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Le coin philo de PG

Gilets jaunes: non à la "République des Tuches"

Gilets jaunes : Non à la « République des Tuches »
Une révolte est un phénomène de type germination-croissance. Rien ne se passe, en apparence, durant un délai indéterminé : le temps de latence. Puis les choses s’accélèrent exponentiellement sans contrôle apparent possible. Depuis très longtemps nos gouvernants ont rivalisé par manque d’imagination pour nous préparer notre avenir. Leur grande découverte n’étant que de savoir boucher un trou en en fabricant un autre et depuis peu de nous culpabiliser. La planète ne serait pas sauvée si les français ne payent pas la taxe carbone et des vies seraient perdues si nous ne respectons pas les 80 km/h ! Comme l’on dirait dans certaines de nos régions : ils nous prennent pour des « jambons ». A force de tirer sur la ficelle fiscale et de nous donner mauvaise conscience, une accumulation de ressentiments, de rejets, de frustrations s’opère dans l’inconscient collectif et conduit à la révolte.
Les gilets jaunes originels, issus de la majorité silencieuse, avaient la légitimité de dire aux gouvernants en place que trop, c’est trop ! Il fallait que ceux-ci prennent conscience que la vie de beaucoup ne se résumait pas à une modélisation économique. La souffrance, la pauvreté ne se mettent pas en équation ! La conséquence directe de cette manière d’agir est de faire penser qu’une gangrène touche les dirigeants qui, de plus, se cooptent en négligeant l’ascenseur social et la méritocratie. Il fallait donc un haut-là. Pour qu’il fut retentissant il fallait donc dépasser les partis politiques, les associations syndicales, les mots d’ordre habituels, ce qui entraine de fait une posture « apolitique ». Rapidement cette posture vînt en contradiction avec certaines revendications qui sont, malgré ce qu’en pensent les gilets jaunes, politiques. L’occasion était trop belle pour ne pas utiliser cette composante politique, pourtant non ressentie comme telle par les gilets jaunes. Le premier de cordée est suspecté de nous emmener sur des chemins difficiles, et c’est le président de la république que l’on veut démissionner. C’est bien un acte politique ! Après toute cette rancoeur accumulée c’est maintenant un aveuglement qui s’opère. Aveuglement sur le sens même des mots : politique, démocratie. Les gilets jaunes font de la politique à la manière de monsieur Jourdain comme on vient de l’évoquer et maintenant ils revendiquent plus de démocratie en ne respectant pas celle qui existe. Il a même été possible d’entendre certains, parler de régime antidémocratique. Il pourrait peut-être leur être prescrit quelques voyages initiatiques dans de nombreux pays du monde où il règne un vrai totalitarisme, un vrai déficit de liberté, afin qu’ils apprennent le sens du mot démocratie. Il est vrai qu’à une époque, beaucoup ont idéalisé la révolution culturelle chinoise en niant les faits atroces auxquels ils restaient idéologiquement aveugles.
Mais le pire reste à venir ! Qu’advient-il lorsque l’on rejette les élites et les intellectuels qui nous auraient égarés ? Il advient le « truchisme », ce populisme qui pense que le seul sens possible c’est de fuir la technocratie par le biais de la simplification extrême : le simplisme. Certes les technocrates, en voulant réguler, ont envahi les choses de normalisations paralysantes. L’idéal serait que le technocrate propose les solutions possibles à un problème et que le politique choisisse celle qui fait avancer la société dans un domaine sans la freiner pour d’autres situations. Pour faire ce choix il est nécessaire d’avoir une expertise car les problèmes sont beaucoup plus complexes que ce qu’en pensent ces gilets jaunes. Monsieur Tout le Monde n’est pas capable de cette expertise ce qui a conduit à la démocratie représentative. En déposant un bulletin de vote dans l’urne nous choisissons celle ou celui qui nous représentera et que l’on pense capable de s’attaquer à différents problèmes.
Mais le bulletin de vote n’est pas la seule expression de la démocratie, comme le pense les anarchistes. Pour assurer l’égalité des citoyens il faut un état de droit. L’imbrication des problèmes explique cette complexité. Et le monde en s’ouvrant à nous grâce aux progrès de la communication engendre une complexification accrue. Les solutions apparentes ne sont pas forcément celles qui doivent être retenues car les conséquences doivent être examinées pour déterminer tous les impacts engendrés par elles . Un avis n’est pas une expertise ! Il faut même faire attention qu’une loi démocratiquement votée soit suffisamment universelle et ne soit pas soumise à des interprétations différentes en fonction de majorités gouvernantes différentes. Et puis l’Histoire nous montre que le meilleur n’est pas toujours l’apanage du peuple. En Egypte, si A. El Sadate avait mis à référendum la proposition de paix avec l’Israël, celle-ci eut été majoritairement rejetée. Si F. Mitterrand avait mis à référendum l’abolition de la peine de mort, le peuple l’aurait sûrement rejetée. Le peuple n’a donc pas toujours raison, il a besoin d’éclaireur, il gouverne par délégation. Et si la voie choisie par les élus ne convient pas il est possible de sanctionner au vote suivant. Pour que la démocratie soit vraiment vivante, ce n’est pas de RIC dont elle a besoin mais de débats profonds lors des élections. Assez de s’occuper des costumes de tel ou tel candidat, mais forçons ceux-ci à développer le chemin qu’ils proposent à la société. Ce chemin n’est pas un catalogue, ce doit être une vision. Et là, la presse a un rôle majeur à jouer, elle doit choisir entre le buzz et l’aide aux citoyens.
Issue d’un malaise, la démarche des gilets jaunes était nécessaire. Mais outre les violences dégagées en corollaire par certains adeptes du grand soir, le mouvement s’est cru capable de justice sans comprendre que celle qu’ils proposaient n’était qu’une parodie superficielle de justice qui ne résoudrait rien des véritables problèmes qui se posent. Maintenant il reste à nos gouvernants à conclure cet épisode en donnant en premier lieu les conditions réelles pour que chacun se sente vraiment comme faisant partie d’un tout.

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