"Tous pourris".....attention

« Tous pourris »…..attention… !
Il n'était pas rare qu'autour d'un repas familial ou amical que quelqu'un se laisse aller à prononcer cette affirmation : « Tous pourris ». Tout ceci restait dans un cercle fermé dans lequel seulement quelques interlocuteurs pouvaient en débattre. La libération massive de la parole à ce sujet s’est établie avec les gilets jaunes qui en ont fait un quasi slogan. Mais bien entendu elle a obtenu ses . …..lettres de noblesse….avec un certain président des États-Unis fustigeant les journalistes.
« Tous pourris », quels sont donc ces « Tous » ?
En fait il s'agit là, surtout, de la rébellion de ceux qui n’ont pas de pouvoir envers ceux qui en détiennent. Pour avancer l'humanité se scinde en deux parties : ceux qui - à raison ou à tord - pensent pouvoir organiser les choses et ceux qui servent cette organisation . C'est un fait. Le système peut fonctionner sans accros si la confiance, aveugle ou délibérée, est mutuelle entre ces deux parties.
Pour éviter tout procès en naïveté disons de suite que l'escroquerie faisant partie du panel des possibles chez les humains , aucune partie de la population est exemptée de ce défaut, même si l'escroquerie parmi les gens de pouvoir a, de fait, une dimension bien supérieure à celle du reste de la population. Le travail au noir est une escroquerie courante faite à la société qui ne bénéficie pas de l'argent de la TVA ; l'évasion fiscale de riches ou d’entreprises représente une bien plus grande perte pour la société. En ce sens nous sommes alors certainement tous pourris, mais certains plus que d'autres !
Il existe trois grands pouvoirs : le pouvoir politique, le pouvoir économique, le pouvoir de communication. C'est bien entendu là où l'on trouvera les « Tous ». Mais comme il vient d'être dit, le « Tous » est statistiquement abusif et certainement méprisant pour les honnêtes décideurs. Mais quand on veut frapper, mieux vaut frapper fort et sans trop de discernement. La méthode est ancestrale et simpliste : désigner un bouc émissaire : les riches, les immigrés, les juifs, les élites, les politiques, les journalistes ….…qui seraient responsables des maux que l'on subis. Et désormais grâce aux réseaux sociaux la force de frappe est considérable et son effet exponentiel. Chacun pense alors qu'il avait raison de penser secrètement ainsi puisque des milliers de congénères viennent le conforter dans son opinion primitive et pourtant primaire . Même si le pourcentage de personnes concernées reste finalement faible, leur bruit assourdissant fait croire à une majorité. Liberté d'expression et de pensée, direz-vous ! Assurément si l'on était sûr que quelques individus n'attendaient pas le moment propice, tel le surffer qui attend la bonne vague, pour concocter un régime populiste non démocratique. Chaque internaute partageant ce « Tous pourris » doit être conscient qu'il nourrit la vague qui pourrait nous emporter. N'avons-nous pas retenu les leçons de l'histoire ? Hitler fut porté au pouvoir démocratiquement bien même après la parution de « Mein Kampf » qui comportait pourtant les éléments de la question juive. Outre le traité de Versailles, les juifs et leur pouvoir étaient une cause élémentaire du problème ressenti par le peuple allemand, d' après la rumeur hitlérienne qui s'amplifiait. La haine institutionnalisée des juifs conduisit inexorablement au rejet puis à l'élimination …….du problème…..
« Tous pourris », c'est remettre en cause des acteurs de la démocratie, de l'économie, de la communication. C'est faire penser que la démocratie est fausse, voire impossible, que l'information est biaisée systématiquement, que l'économie n'est faite que pour enrichir davantage ses promoteurs. C'est donc objectivement, par conséquence, ouvrir la voie à un régime fasciste, seule alternative à cette déconstruction à couleur anarchisante. À vouloir laver plus blanc que blanc, c'est Saint Just et Robespierre, figures pourtant non corrompues, qui instaurent la Terreur, une sorte de nettoyage républicain salutaire à leurs yeux, c'est Staline qui veut la pérennité du communisme en envoyant au goulag ceux qui s'écartent de la bonne doctrine, c'est Mao qui par sa révolution culturelle envoie, au mieux, des élites intellectuelles se « désintoxiquer » par des labeurs campagnards .
« Tous pourris » est donc une accusation dangereuse. Stigmatiser la corruption est un devoir, faire penser que tous ceux qui exercent un pouvoir sont forcément corrompus est une faute lourde des conséquences qui viennent d'être évoquées.
En cette période fragile de pandémie, ne doutons pas un instant de l'existence de quelques affûteurs, profitant du désarroi pour initier puis entretenir la vague qui insidieusement au final ensevelira nos fondements. Même si pourriture il doit y avoir, non, ils ne sont pas tous pourris ! La Démocratie n'est pas une fatalité, elle se gagne et elle se mérite, à commencer en s'abstenant d'amalgames simplistes.