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Le coin philo de PG
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  • Diverses réflexions à caractère philosophique de la part d'un non-philosophe, et qui ne sont pas des leçons ! Ce blog de Patrice GOEURIOT contient des textes originaux sur le thème de la philosophie qui demandent l'autorisation de l'auteur pour être cités.
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Le silence

Pat TIOCŒUR

 

Essai

 

 

 Le silence

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Du silence naît tout ce qui vit et dure. Car c'est le silence qui nous relie à l'univers, à l'infini, il est la racine de l'existence et par là l'équilibre de la vie. »

Yehudi MENUHIN


 

 

 

 

 

Ambiance

 Venus d'un ciel que l'on ne voyait pas, de lourds flocons tombaient selon une verticale parfaite. Ils venaient s'écraser lamentablement sur un tapis blanc en gommant les aspérités d'un relief pourtant mouvementé. La savante nature savait ingénieusement se transformer ainsi en un vaste univers anéchoïque. Dehors, un chat luttait contre ces milliers d'assaillants blancs qui fondaient sur lui comme des oiseaux d'Hitchcock. Pas le moindre mouvement d'air qui aurait fait chanter quelques branches en les agitant.

À l'intérieur de la maison perdue dans cet univers blanc, un feu dévorait quelques bûches avec un crépitement qui ne traversait pas la vitre de l'insert de cheminée. Lovée dans un vaste fauteuil Elle lisait un roman sans même qu'un bruissement de pages que l'on tourne ne vienne interrompre le silence. Lui, assis sur le canapé, Il regardait dehors ce spectacle naturel, une revue ouverte sur ses genoux. Ce monde si agité à l'ordinaire semblait être enfin entré en paix.

« - Que ce silence fait du bien ! Lança-t’ Elle sans que personne ne s'attende à cette interruption du silence.

- Je le trouve mortel ! » Répondit-Il en écho.

Puis la pièce retrouva le calme ennuyeux et apaisant du silence, et les heures passèrent dans cette lecture et cette méditation tranquilles.

 

Cet ersatz de paix était-il le moyen donné par la nature pour donner aux hommes des instants de quiétude qui engendreraient la saine réflexion ? Ne sommes-nous pas capables, seuls, de trouver des instants de discernement et avons-nous besoin de signes extérieurs qui nous poussent à rechercher l'essentiel ? Est-ce dans le silence que l'on trouve des gisements de discours muets ? Ces questions embrouillaient l'esprit de celui qui regardait mélancoliquement tomber cette poudre aux yeux, la neige.

 

 

 

 

Elle

Elle, elle était douceur. Ses gestes avaient toujours une certaine rondeur sans qu'aucune saccade ne vienne en perturber cette liste tendance. Elle était musique. C'était plutôt «  La Mer » que «  La Symphonie Fantastique », plutôt «  La Petite Musique de Nuit » que » L’Ode à la Joie ». Mais, sur la portée musicale de sa vie Elle y plaçait souvent des silences sans que cela ne soit pourtant des soupirs.

 

Clair et concis, son discours ne manquait jamais de pédagogie. Elle savait expliquer sans se perdre dans une litanie. Elle aimait faire partager son savoir sans jamais que cela ne soit condescendant. Elle masquait aussi son manque de confiance en elle en lançant : « je n'ai rien d'intéressant à dire ». Bien sûr que si, Elle aurait pu souvent discuter, mais Elle ne le souhaitait pas. Parfois tout de même, Elle se lançait. La religion s'offrait, parcimonieusement, pour contrecarrer l'opinion bien tranchée de son mari, mais aucun prosélytisme n'émanait de son propos, Elle laissait le choix de libre pensée à son interlocuteur.

 

Au bord de son ruisseau Elle avait, un jour, discerner une lumière. L'une de ces lumières qui montrent la direction à suivre et qui pour Elle devint désormais la seule administration de sa vie. Avant, Elle n'avait que l'intuition de ses choix. Maintenant ceux-ci s'imposaient à Elle avec un réel manque de spontanéité, il faut bien l'avouer ! N'était-elle pas passée, à cet instant, d'une créature libre à une créature prédestinée. Elle ne le savait pas elle-même, et ce n'était pas très facile pour Elle de l’avouer, Elle le reconnaissait. En corollaire, Elle laissait paraître  être investie par l’Esprit Sain. Ses dires et ses gestes ne pouvaient donc être autre chose que purs, en donnant l’image du Bien et peut-être bien même celle de la Vérité. Elle pouvait contester fermement qu’on lui fasse quelques réprimandes même sur des futilités. C’était la partie exaspérante de son être pour qui ne connaissait pas ses convictions religieuses. A trop être attentionné on devient culpabilisant pour celui qui reçoit ces manifestations. Beaucoup de choses de sa vie étaient des croix qu’Elle portait finalement avec une certaine jubilation par identification aux manifestations de la rédemption. L’acte commis était-il purement gratuit ? Etait-ce un don ou un investissement ? Le peu ou le pas de commentaire donnait à ce silence une pesanteur, un climat que sa bonté ne souhaitait certainement pas mais qui envahissaient tout de même  son entourage. A être prévisibles n’apparaissons-nous pas simplement  guidés et la notion de liberté de conscience s’en trouve alors très singulièrement bornée. Les religions avec des degrés divers ordonnent, tel un champ magnétique, les consciences de ses pratiquants en bafouant ainsi la liberté qu’elles disent que Dieu leur aurait donnée. Ce don ne devrait-il pas  être  pour que cette liberté  donne un sens à la vie terrestre ? Sa dévotion ne la faisait pas penser ainsi. Arc-boutée sur ses convictions Elle ne voyait pas qu’Elle apparaissait telle une femme de devoir, terme qu’Elle réfutait avec une forte animosité.

 

Cette évolution de son être, qui n’était qu’une exacerbation et une radicalisation de ce qu’Elle était vraiment avant sa révélation, n’entamait pas l’amour que lui portait son mari même s’Il regrettait que cette posture ne conduisit parfois qu’à des conflits inutiles d’où un silence ressortait malheureusement toujours vainqueur. Il y avait pourtant là souvent l’occasion d’une discussion qui aurait dû conduire à un littéral échange, mais non. Elle devait penser que leurs pensées philosophico- religieuses étaient tellement éloignées et si tranchées qu’elles  risquaient  peu de se rapprocher ; dès lors tout verbiage était inutile et son sens de l’efficacité lui faisait penser que ce temps, prétendument perdu, était donc mieux occupé par quelques tâches concrètes…..A moins qu’à l’instar de Saint Augustin pensait-Elle au fond que la religion supplée le besoin philosophique, pour clore tout débat !

 

 

 Lui

 Lui, c'était un magma en fusion. Même au repos son esprit bruissait silencieusement de brides élémentaires de pensées qui cherchaient à se structurer. Il profitait de longues et nombreuses promenades pour affiner sa pensée. Ou bien c'était la nuit, réveillé par une éruption lumineuse qui éclairait remarquablement son moi profond. Oscillant entre pragmatisme et utopie Il n'arrivait pas à stabiliser le pendule dans un état qui l’eut caractérisé. Quelque astrologue aurait certainement vu là, la manifestation de son signe astral, la balance.

 

De ce volcan, en ressortait-il des blocs inertes de pierres créant de vastes champs incultes ou bien une terre noire riche de minéraux d’où germerait le blé nourricier ? Hélas, Il pestait contre son cerveau qui avait bien du mal à exprimer ce qu'Il ressentait. A la longue, des formes élaborées de pensées perlaient dans sa tête mais Il ne savait pas les faire partager par une éloquence convaincante. Alors, cela ne servait à rien ! Pensées inutiles non captables par un puits tari. Milles occasions lui étaient offertes pour distiller sa pensée, mais les mots n'avaient pas le temps de s'organiser dans son cerveau pour venir finalement chuchoter à des  oreilles avides d’un flot délicat de phrases. Il se taisait donc ! Il privait les autres de ses interrogations et de ses réponses. Il paraissait neutre, donc insignifiant. Alors qu'Il portait en lui une vraie parole,  Il restait silence...

 

Sur la route de l'espérance, Il s’était perdu. A moins que finalement les routes humaines ne soient toutes que des chemins sans issues !

La vitalité de sa jeune vieillesse cachait mal la réalité de l’age. L'accomplissement personnel n'a de sens que dans le don de son expérience à l'humanité ; passé un certain temps celle-ci n'a cure du vécu de celui dont l’expérience n’intéresse plus, car déphasée  avec les préoccupations différentes et parfois futiles des plus jeunes.

Quelques mois avaient suffi pour lui faire comprendre, contrairement à ce qu'Il pensait, que la force personnelle n'était pas suffisante pour aborder la cessation d'activité professionnelle. Déjà Il comprenait qu'Il ne faisait plus la priorité ; que cette inactivité professionnelle ne pesait pas lourd devant les projets…. prodigieux…. de ceux qui travaillent. Professionnellement Il croyait avoir transmis un témoin, Il avait transmis un fardeau qui nécessitait de ne pas trop s'attarder sur l’inactif qu’Il était devenu.

Avec son dernier fils, venu trop tard, Il aurait aimé partager le temps, des sentiments, des difficultés, des espoirs, mais il était déjà trop vieux comme Il l'avait prémonitoirement pensé dès sa naissance. Ses trop longs silences n'avaient pas aidé à l'établissement d'un contact fort d’autant que lorsqu'Il les rompait, Il s'entendait dire que sa sage expérience était vraiment ennuyeuse.

Malgré son espoir engendrait-Il encore le désir ? Suscitait-Il le besoin de savoir ? Dans le fond, non et Il s’en lamentait. Il ne pensait pas encore appartenir à ceux qui trouvent décidément que tout fout le camp, que c'était mieux avant, car Il était sensible à la nécessaire évolution humaine, et pourtant Il était déjà mis en marge. Quel espoir lui restait-Il donc ? Certainement pas d’être comme ce mausolée que l'on visite soi-disant pour ne pas oublier. Certainement pas celui d’être une potiche qui embellit la photo de famille.

Mais, savait-il seulement exprimer ce désir ou faire ressortir ce besoin du savoir ? Ce n’est pas parce que dans sa tête désir et besoin de savoir se répandaient, que son entourage était sensible à quelque chose qui n’émergeait pas de son être. Il y avait là dans cette incapacité un ressemblant troublant avec certaines confessions de Jean-Jacques Rousseau.

 

 L’être ou le paraître

 

Le questionnement sur l’être et le paraître n'est peut-être que celui sur l'absolu et le relatif. Bien sûr qu'il n'est pas question de s'interroger sur la superficialité qu’a fait naître l'envahissant développement de la communication. Mais de savoir si ce qu’on croit être, est perçu ainsi par son environnement.

 

Le langage, premier véhicule de communication de l'humanité, en dépit de la richesse du vocabulaire est source de male perception. Ayant écarté la mauvaise foi qui pourrait animer un récepteur, l'image ou le message de l'autre nous pénètre-t-il identique à celle, celui qui nous a été envoyé ?

 

La beauté que nous ressentons n'est-elle pas filtrée par quelques préjugés, sentiments,  conformisme ?... Une femme à qui l’on dit qu'elle est belle, a fait naître antérieurement quelques autres impressions qui parachèvent la beauté avouée - sinon on se tait ! Il faudrait mieux dire : « je vous sens belle » car d'autres ne se seraient jamais retournés pour dire avoir perçu une beauté. Ce qui est important n'est pas le degré d'esthétisme mais c'est le fait d'avoir ressenti une impression de beauté, puis de l'avoir dite. Et cette petite phrase anodine : vous êtes belle, comment  se trouve-t-elle accueillie par la personne remarquée ? Etait-ce de la flagornerie, de la drague ou tout simplement de la sincérité ? Rien ne le présuppose. L'onde sonore émise va traverser nombre de filtres culturels, émotionnels qui vont déformer la sonorité des mots pour en faire le message que l'on est prêt à recevoir ou bien à rejeter, à moins que l'on ne s'adresse à une petite fille dont la candeur ne lui fera saisir que le premier et seul degré qui aurait dû être perçu.

 

Elle et Lui sont de ceux qui s'interrogent, réfléchissent, agissent en conscience en un mot. Ils se cherchaient sans cesse, chacun à leur manière, un chemin de conscience qui sous-tendrait leurs comportements humains. À partir de là chacun savait ce qu'il était et revendiquait la droiture qui en découlait. Forcément, cette droiture ne pouvait être contestée par quiconque puisqu'elle s'inspirait du Bien considéré par chacun, sinon il s'agirait d'un hideux procès d'intention. Naïvement, ils pensaient donc que leur paraître ne pouvait être que leur être. Mais le paraître n’est défini que par celui qui reçoit et il est donc prétentieux de penser qu’ils ne puissent paraître que ce qu’ils croyaient être. La première conséquence en était la non communication entre eux de ce qu’ils pensaient être puisque a priori ils pensaient que ceci était compris par l’autre ; ce silence était une grave erreur en nourrissant toutes les supputations possibles. Mais il n’est pas sûr d’ailleurs que si des mots avaient été échangés, le résultat eût été  meilleur. A moins d’avoir ingurgité tout le dictionnaire par cœur, le mot qui vient à l’esprit dans une banale conversation n’est peut-être pas pris avec la même définition par l’écouteur et l’orateur, et déjà une incompréhension peut naître. Ceci pousse souvent les protagonistes au silence, leur action n’ayant pour eux besoin d’aucun justificatif oral en vertu de ce qu’ils pensent  paraître.

Cette croyance de leurs certitudes du paraître est par ailleurs source d’intolérance. Parce que l’on a pris le soin de la réflexion, la position adoptée ne peut-elle être que vérité ? Les religions ouvrent à cette certitude. Soit par leur dévotion pour les chrétiens, ou par la soumission pour les musulmans, l’acte étant inspiré par Dieu il ne peut être mauvais. La soumission étant bien plus drastique que la dévotion il en ressort une fierté absolue du musulman qui ne peut que contester ce que d’aucun pourrait leur reprocher. Puisque Dieu a mis le Bien en eux et qu’ils font tout ce que demande Dieu, même dans leur travail, ils ne peuvent supporter qu’on leur dise que celui-ci ne soit pas bon ! On voit bien là l’insidieux effet de la religion sur le comportement des êtres et de leurs relations. Elle et Lui, par leur culture, n’échappaient pas à cette intolérance dont ils ne voulaient pourtant pas admettre en être atteints.


 

La tolérance

 

La tolérance, voilà peut-être un des plus beaux mots du vocabulaire de l'humanité. C'est en effet un des éléments constitutifs du ciment qui crée une société. La tolérance c'est l'acceptation des différences ;  personne étant détenteur de la Vérité nous devons accepter, notre pensée fut-elle élaborée n'étant pas universel, que d'autres visions soient aussi généreuses et prometteuses que les nôtres.

 

En ce début de XXIe siècle nos sociétés sont troublées, désarçonnées par des évolutions trop rapides à assimiler et l'édifice sociétal semble fragile. Il faut donc ne rien faire qui puisse le déstabiliser davantage. C'est ainsi que la tolérance prend parfois des airs d'hypocrisie. Tolérer veut-il dire tout accepter? Apporter la critique serait-elle devenue de l’intolérance? Appuyons notre raisonnement sur trois faits de notre histoire : le négationnisme, le créationnisme, et la religion.

 

D'aucuns pensent que l'holocauste n'a pas existé, que c'est une invention de quelques-uns pour stigmatiser l'attention de tous au détriment d'autres problèmes. Au nom de la tolérance peut-on accepter de ne rien dire et de laisser-faire ? Bien sûr que non, car ici l'holocauste est un fait historique démontré et que le nier est nier l'évidence. On a alors le devoir d'intolérance envers ceux qui s'acharnent à refaire l'Histoire.

 

Adam et Eve, quelle belle histoire n'est-ce pas ? L'irrationalisme endémique de l'homme est satisfait par cette nouvelle merveilleuse de la création. Mais voilà que Darwin et consorts nous démontrent l'évolution. Doit-on respecter la pensée créationniste et laisser ainsi le doute s'installer dans quelques esprits fragiles ? L'ignorance doit être combattue pour éviter qu'elle fasse le lit de certains, avides de pouvoir facile.

 

La liberté religieuse n'a aucune raison d'être contestée. Avoir une croyance et la vivre est respectable. La société doit d’ailleurs mettre à disposition les éléments qui vont permettre l'épanouissement de ses individus sans porter de jugement sur le sens de cet épanouissement. Mais, doit-elle rester muette quand une religion soutient que tous ceux qui ne pensent pas comme cette religion le propose, doivent être considérés comme des ennemis (Sourate 3 : La famille d'Imran (Al-Imran) ? Pis encore, dans un masochisme peu égalé, le Coran laisse penser que cet autre, pris en dehors de sa communauté et pourtant traité en ami, se réjouit en fait  des malheurs du bon croyant. C'est sûr, l'exemple vivant l'a montré, même des musulmans se disant éloignés de l'intégrisme religieux, dans certaines conditions, se montrent sous ce jour d'intolérance. Faudrait-il alors tendre l'autre joue sous prétexte de tolérance ? Il n'y a pas ici de cristallisation idéologique contre l'Islam, mais l'Islam doit se réformer et retirer toute référence à l’intolérance pour qu'il puisse être accepté par les membres des autres communautés. Libres alors à ses croyants d’assumer leur soumission, s’ils pensent ainsi ; mais sans vouloir imposer aux autres, leur vérité. Ne rien dire, sous prétexte de tolérance, serait un crime contre l'humanité. Le silence serait alors un complice involontaire de l’intolérance.


Le son et les électrons

 En quelques décennies la vitesse de l’information est passée de celle de la vitesse du son à celle des électrons. La voix était le véhicule le plus rapide pour communiquer, une euphorie sonore en résultait ; les roulements de tambour du garde champêtre venant apporter « l’avisss… à la population » résonnent encore dans la mémoire des plus anciens. Désormais, du fait de sa transmission quasi instantanée, un évènement est porté à chacun  on live après un léger cliquetis du bouton de la souris de l’ordinateur c'est-à-dire dans un quasi silence. L’onde sonore est remplacée par l’onde électromagnétique d’un courant d’électrons dont la fréquence ne peut être perçue par nos oreilles. La nouvelle émerge du silence sans l’interrompre alors que la rumeur s’étalait bruyamment autrefois. Malgré ce silence mais avec ce raz de marée d’informations, la réflexion n’en est pas plus aisée ; une superficialité s’instaure car  la nouveauté à peine reçue est déjà dépassée. On en vient à envier ce moine qui dans le silence de son monastère  médite longuement sur le sens de la création et pour qui le temps ne semble pas s’écouler. Ce temps qui nous manque désormais cruellement pour exister. Le silence de la télécommunication ne crée pas les mêmes conditions de  réflexion que le froid silence du monastère, alors que dans chaque cas l’homme est seul pour utiliser ce qu’il reçoit afin de l’aider à créer son existence.

 

Notre époque sera retenue par l’Histoire comme celle de l’ultra communication. N’a-t’on pas fait croire que la possession d’un téléphone portable était l’émanation de l’homme bien dans son temps, toujours en relation potentielle avec le reste du monde ? Celui qui ne disait plus bonjour aux personnes croisées dans son escalier se trouve tout à coup investi d’un besoin d’échange causé par la sophistication de la technologie qui lui a fait naître, comme par enchantement, des milliers d’amis avec lesquels il a envie de prendre l’apéro ! Le dictionnaire va-t-il être obligé de revoir la définition du mot ami ?

 Toutes les stations de radios ont modifié leur approche de l’auditeur en lui donnant abondamment la parole sur leurs ondes. Les événements sont évoqués par quelques phrases puis suit un flot de commentaires, non plus ceux de spécialistes mais ceux de monsieur et madame tout le monde. Avant même la vraie information, l’opinion est faite et est souvent péremptoire. N’avons-nous pas appris que c’est dans l’étude d’avis éclairés et parfois contradictoires, que l’on pouvait finalement se faire sa propre pensée ? La vitesse de la télécommunication n’a pourtant rien à voir avec la vitesse d’élaboration de la pensée ; il faut bien en convenir celle-ci devient alors très fragile bien que dite très haut. Quelques grincheux, peut-être récalcitrant  à la transparence, rumineront  dans le même temps : «  ils feraient mieux de se taire ! ». A qui la raison ? A ceux, déphasés par rapport à la majorité de leurs congénères mais porteurs d’une pensée recherchant l’universalité ou bien ceux qui créent le monde dans l’instant évanescent ? Corrélativement ceci pose la question politique  du devenir de la démocratie. L’Histoire a montré que l’expression populaire directe n’était pas forcément gage de sagesse, en conduisant parfois les peuples à leur ingouvernabilité ou pire à l’éclosion d’idées tyranniques et apocalyptiques. Mais pour autant, doit-on refuser d’être dans le mouvement parce que l’on prétexte ne pas savoir où celui-ci conduit ? L’agitation politico-médiatique permanente actuelle est le reflet de ce monde sans base mais clinquant qui s’élabore. Peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse…il s’agit d’une vraie question existentielle que l’on aborde inconsciemment.

Qui ne dit mot, consent ! Le refuge dans le silence se fait par timidité ou par incompétence.  La majorité silencieuse a alors bon dos et la confusion du silence n’informe pas sur la marche à suivre qui se fait alors souvent par défaut. Nombre de politiciens se sont appuyés sur cette commode majorité silencieuse, celle-ci étant un gage de bonne démocratie représentationnelle mais permettant aussi l’arbitraire par l’opacité même de son contour.

L’individu est sondé de toutes parts, le citoyen appelé régulièrement aux urnes, et pourtant un sentiment de rupture  avec les pouvoirs existe en chacun d’eux. C’est ce ressentit qui est important, qu’il faut étudier et résoudre pour éviter la révolte. Cette quasi constante interrogation médiatique n’est qu’un ersatz de démocratie mais elle fait savoir au plus grand nombre l’inquiétude de chacun, ce qui engendre  la sinistrose. La république doit tenir compte de cette forme nouvelle de citoyenneté et réformer sa constitution pour resserrer les liens entre gouvernants et gouvernés, sachant que les premiers ne seront jamais que les représentants éclairés des seconds. Malgré le vote démocratique, les gouvernants ne sont aujourd’hui considérés que comme les délégués d’une seule partie de la société. Il conviendrait dès lors qu’une assemblée représentative des opinions s’oblige à ressortir le dénominateur commun, et non plus seulement la majorité de celles-ci, pour  proposer la loi qui définirait ce que la société désire comme fondement. Ne verrions-nous pas enfin s’éteindre les querelles partisanes qui puérilisent actuellement le vrai débat d’idées ? Un dénominateur commun n’est pas la recherche du minimum, mais ce doit être le politiquement et l’économiquement raisonnable pour la société. La mondialisation a donné à l’économie un rôle primordial en surfant sur les inégalités internationales. Si le luxe de l’occident use l’envie des uns, ailleurs la faim des autres entretient  l’espoir de leur mieux et engendre l’obstination nécessaire à leur réussite. A condition de donner à l’Homme la seule place centrale qui lui revient, la politique doit, in fine, affirmer des choix conformes à la norme voulue pour l’espèce humaine. La politique doit être réinventée puis réhabilitée si l’on veut éviter le chaos.

 Le XVIIIe siècle a généré le temps des Lumières pour le sortir de l’obscurantisme, le XIXe fut celui de l’utopie qui a entraîné le XXe vers le désastre malgré l’essor de la technologie ; le XXIe doit être le temps des Esprits pour le sortir  de la  navrante et stérile cacophonie de l’éphémère.

Malraux n’a rien dit d’autre en disant qu’il serait religieux. Il n’a pas dit qu’il devait être religieux mais serait religieux ; car il devra devenir spirituel pour trancher avec la médiocrité dans laquelle la mise la virtualité transformée en philosophie, sous peine de ne plus exister.

La marche silencieuse de l’esprit doit donc reprendre son cours. Que les intellectuels ne se considèrent pas être dans le viseur de cette tirade, ils doivent simplement, au-delà de leur cercle trop fermé donc commode, diffuser les éléments nourriciers de la pensée pour chacun et refuser d’entretenir un système qui ne valorise que la forme. L’individu lambda ne peut rien seul, surtout aujourd’hui où la dictature de la communication impose le réseau. Quand bien même serait-il désireux de disperser ses idées, un son inaudible en ressortirait, noyé qu’il serait dans le brouhaha creux émis par ceux qui se contentent d’un monde en 2D[*]. Ceux qui ont la chance aujourd’hui de tenir le haut du pavé médiatique ont une responsabilité immense pour donner l’envie de trouver du sens à la vie, sans quoi le pire nous attend tranquillement. La chute d’une civilisation n’est pas un mythe, le risque existe comme l’Histoire de l’humanité l’a montré, et elle est d’autant moins visible quand on l’accompagne de l’intérieur. Il n’y a  là rien de défaitiste, au contraire c’est un appel au ressaisissement possible.

D’aucuns pensent que c’est l’égoïsme qui ferait avancer le monde et que tout système tendant à raboter ce caractère annihilerait les ressorts de l’envie de l’en-avant. Il y a là un fatalisme qui ferait que rien n’est possible pour réformer notre système. Mais l’évolution, ce n’est pas seulement l’évolution des caractéristiques morphologiques de l’espèce. Car l’homme, n’en plaise à certains, n’est pas un être similaire aux autres espèces animales en ce sens que c’est le seul qui a connu une évolution telle qu’il gouverne ses actions de façon réfléchie. Aucune allusion religieuse n’est besoin pour faire ce constat. A nous donc de nous prendre en main afin d’évoluer dans nos caractères même ; au titre de ceux-là l’égoïsme n’a pas une fatalité à ne pas se transformer chez l’humain, à nous d’en décider. A cette occasion on aperçoit là les risques du système majoritaire et de la nouvelle mode de la démocratie participative. Si l’on doit attendre qu’une majorité se dégage envers ces idées, la catastrophe nous rattrapera. Il faut qu’une assemblée responsable, réfléchisse aux choses fondamentales devant gouverner la société et qu’en son âme et conscience, sans parti pris, imprime le chemin. Voilà qui est faire de la politique, enfin ! L’humanité travaillerait  directement au contrôle de son évolution, alors qu’aujourd’hui celle-ci se fait dans son inconscient au gré de ses réactions erratiques. Gouverner ne serait plus simplement prévoir, et encore moins improviser comme c’est le cas actuellement, ce serait destiner.

Yes, we can !

 

 

 Le dire ou l’écrire

 

La convalescence qui s’ouvrait Lui offrait un vaste temps, comme l’océan laisse un immense espace au fleuve qui termine son cours. Du temps, Il en avait donc, alors que celui-ci s’étiolait chaque jour pour son épouse. Cette convalescence allait lui retirer encore du temps pour qu’Elle s’assurât qu’Il ne manquerait de rien durant son quotidien. Le  temps à Elle, il était aussi rare que la rosé dans le désert, mais comme par magie Elle réussissait toujours à en trouver, personne ne savait quel en serait le prix. Il se mit donc à l’exercice d’un distillat qu’Il lui transmettrai dans l’espoir que ce filet de temps qui lui restait à Elle, pourrait mieux le diluer qu’un discours qui ne trouverait peut-être pas le moment propice d’être entamé. Ils avaient l’un et l’autre de graves responsabilités dans le mutisme qui les gagnait chaque jour davantage. Lui avec son angoisse le trouver le mot juste pour être bien compris, Elle avec son envahissant besoin d’efficacité, cela faisait que le tintement des cuillères  dans le bol du petit-déjeuner envahissait tout le vide sonore ainsi laissé.

Il n’y avait plus que de la tristesse qui émanait de son être, le sourire lui semblait interdit et l’intensité de son silence laissait présager un vide sentimental abyssal. Comme tout effet a une cause, Il devait être le coupable idéal et Il avouait ce crime qu’Il n’avait pas recherché mais qui avait été commis inconsciemment du fait de ce qu’Il était et surtout de ce qu’Il n’était pas, tout simplement. Il l’avait donc conduit sur ce chemin de croix, chemin qu’Elle aurait envisagé de quitter un jour mais qu’Elle avait gardé sur des conseils ecclésiastiques avisés. Avertie que ce chemin ne serait pas facile mais qu’il était le seul envisageable pour éviter que les lumières du ciel ne s’éteignent à jamais. Il ne devait plus y avoir de tergiversations, il fallait de la stabilité, et ce pieu qu’Elle avait ramassé un jour au bord de sa route était cette promesse de stabilité. Il n’était pas celui qu’elle avait imaginé mais il était le garant d’une non errance et Elle l’a gardé en dépit des risques pour les joies de sa vie. Comment un pieu pourrait exalter en Elle plus de féminité ? Comment un pieu pourrait générer du désir ? Comment un pieu pourrait nourrir autre chose que du silence ? Le devoir l’emportant sur le désir, la tristesse était inéluctable et Elle avait de plus en plus de mal à contenir quelques soupirs. S’agissait-il d’une rédemption  choisie ? Elle n’agissait plus que pour le Bien, ne s’autorisant rien d’autre qui ne pouvait la conduire que dans le décor. Elle ne croyait qu’à l’essentiel, cette hémiplégie ne la rendait pas humaine mais chrétienne. A quoi servent donc les sens pour la religion ? La sensualité, la sensibilité ne conduiraient donc qu’au mal ! L’Homme est-il condamné à contrôler ses émotions, ne serait-ce pas plutôt les vivre consciemment qui honorerait le Divin ? La religion l’avait sauvé d’une séparation et condamné par là même au châtiment de l’atonie des sens, Il ne finissait pas de lui en vouloir d’avoir transformé l’être qu’Il aimait.

 

Donc, Il n’était qu’un pis allé. Mais ne le méritait-Il pas ? Les événements de la vie sont souvent dus à ce qui est mérité; ce serait bien d’ailleurs qu’il en soit toujours ainsi ! N’était-Il pas finalement différent de ce qu’Il croyait être ? Ce gouffre entre être et paraître est une source de mal être, combien ont plongé dans cet abysse sans espoir de retour ? Fallait-il qu’Il s’y noie ou bien le pragmatisme devait-il l’emporter ? Pouvait-Il quelque chose sur son paraître afin qu’Il soit tel qu’Il croyait être ? Ce serait peine perdue car la manière dont on est perçu dépend en grande partie de l’autre qui déplace à volonté le curseur entre empathie et révulsion. La complexité des rapports humains s’explique par une double interaction entre les protagonistes ; si bien finalement l’on est vraiment que ce que l’autre veut bien que l’on soit.  

 

Le silence est aussi l’art du non-dit, c’était donc peut-être très bien qu’il fût !


 

L’homme moderne

 

 Cueillir, pécher, chasser voici des mots bannis du vocabulaire comportemental de l’homme moderne. Ces mots font désormais souvent honte et classe dans la catégorie « bestiale » ceux qui auraient encore l’impunité de les prononcer et pire encore pour ceux qui les pratique. L’homme moderne aurait-il perdu toute sensibilité au bénéfice de la sensiblerie. Il est vrai qu’il ne connaît le poisson que dans sa forme parallélépipédique et qu’il ne connaît même plus le nom des espèces. Il est vrai que sa viande n’est que hachée entre deux feuilles de fromages et de pain et qu’au jardin de son ami il confond le persil et les carottes. Mais il mange « bio » et dans son 4x4 il ne ramène  du supermarché que des produits dont il a soigneusement lu les étiquettes pour  éviter de s’empoisonner et pour être en pleine forme pour son prochain raid moto tout terrain ! Quant à la mort, il n’ose la rencontrer que dans des jeux vidéo et il se débarrasse au plus vite de la dépouille de son aïeul pour le funérarium….

 

Pourtant comment ne pas rechercher la joie de découvrir la girolle dorée dans son écrin de mousse verte ou bien cette tête de nègre émergeant à peine d’un tapis de feuilles de châtaignier ? Comment ne pas s’émouvoir de ce gobage d’une truite leurrée par une mouche artificielle habilement et délicatement posée au bon endroit près du rocher ? Comment ne pas admirer ce faisan que l’on laisse partir à cause d’une faute à l’étique choisie ou au contraire se faire éclater le cœur en même temps que la gerbe de plomb fauche une bécasse superbement maîtrisée par le chasseur et son chien après une recherche interminable et de multiples échecs. La vie, la mort, la symbiose, l’harmonie voilà qui nourrit le cœur de celui qui ose la nature. Cela n’a rien à voir avec la tradition, l’homme n’est qu’un élément de la nature et il doit ni l’idolâtrer ni la piller. Mais il a le devoir de garder la possibilité de s’émouvoir pour se sortir du virtuel dans lequel certains semblent se complaire, certainement par facilité.

Si l’esprit doit contribuer à l’évolution des hommes, celle-ci ne sera fondamentalement  sellée que si le coeur n’est pas omis. Il ne faut donc jamais stigmatiser tout comportement où un sentiment sérieux est à la base de celui-ci. Dans le silence d’une immense cathédrale aux milles couleurs le promeneur cueilleur, le patient  pêcheur ou  le pénitent chasseur,  le nez à l’affût d’un brin d’air couronné de parfums, l’ouie tendue vers l’imperceptible bruissement de feuilles sèches lui faisant découvrir un petit troglodyte, l’œil aux aguets pour le pas manquer une rencontre animalière fortuite, qu’ils aient un couteau à la main, un appareil photo en bandoulière, une canne à pêche ou un fusil, s’enivreront le cœur d’émotions qui les rendront plus tendres et plus sensibles aux vrais choses de la vie. Et après ces solitudes silencieuses ils iront partager avec leurs amis par d’interminables joyeux récits, les rencontres faites avec la sainte Nature.


Animalité

 

 Seulement un pourcent de différence dans les gènes et pourtant tant de différence entre l’Homme et les grands singes. Les religions ignorant alors l’évolution ont institué cette différence comme une supériorité qui mettait l’Homme au centre du jeu. Cette domination s’est exercée particulièrement sur les animaux soit en les apprivoisant soit en les rudoyant.

Brutale inversion de tendance, une sorte de contrition pousse certains, de plus en plus nombreux, à établir une égalité entre l’Homme et l’animal. Mon bébé en parlant d’un petit chiot,  des dépenses luxueuses pour le bien être de leur animal préféré, la méfiance envers la préparation des animaux de cirque, des comportements qui prouvent que sont projetées sur l’animal des postures humaines, ne sont là que quelques exemples de cette dérive que les médias soulignent complaisamment sans nourrir de débat  sur la portée de cette attitude.

Animalité retrouvée au nom des quatre vingt dix neuf pourcents de gènes communs ou bien  devoir de  repentance ?

Cet exemple ne met qu’en exergue  cette pauvreté spirituelle de notre ère. Pendant que des enfants meurent de faim, que des victimes de catastrophes naturelles sont anéanties par  la fausse  empathie des nantis,  certains passent leur temps et leur argent à  vouloir démontrer  cette égalité hypothétique de l’Homme et de l’animal.

Bien sûr que les problèmes ne se résoudraient pas mieux si ces idées n’étaient pas diffusées, mais c’est une question de principe, de valeur de notre société humaine. La repentance semble le sentiment le plus digne de notre époque, certainement faute de savoir faire mieux ! L’idôlaterie animale ambiante  n’est que le reflet de cette impuissance à créer des valeurs, et le nier en silence ne serait que hurler avec ces apprentis sorciers.

L’Homme n’est pas au centre ni au-dessus, il est au sein de son environnement  mais il doit tout de même se rendre compte que lui, il peut décider tandis que les animaux ne vivent que leur destin sans possibilité pour eux d’en changer le cours. Aussi élaborées que sont quelques sociétés animales, celles-ci ne sont que des organisations  instinctives de survivance, sans dessein.  A trop  vouloir l’égalité avec l’homme on prête aux animaux des sentiments qui ne sont qu’une projection fausse de nos propres émotions, même si parfois de rudimentaires manifestations feraient penser à de véritables sentiments. Qu’ont-il fait eux pendant que l’humain se formait et parvenait à émerger du fatal destin au bénéfice de  son autogestion ? Ils sont restés soumis à leur nature et n’ont dominé que pour mieux proliférer sans que cela entraîne une évolution quelconque de leur espèce. Ce besoin de domination certainement présent dans les quatre vingt dix neuf pourcents de gènes communs, fut repris par l’Homme souvent pour de funestes missions, mais toujours l’humanité en a tiré finalement leçon pour se modifier. Il a conquis le monde et nous sommes tous des fils et filles de colonisateurs ; le plus fort, puis le plus développé apportant aux autres son savoir-faire et surtout pas sa Vérité. Notre animalité fait ressortir ce besoin de domination qui, du cercle limité à la meute animale, va s’assouvir à l’échelle de la planète du fait du percent génétique qui nous différencie de l’animal le plus proche de nous. Pour autant, devons-nous nous repentir d’avoir conquis l’espace que notre intelligence nous poussait à envahir ? Il n’y a que les bien-pensants refaisant l’histoire après coup qui osent la repentance de ces invasions inéluctables puisque conformes au schéma historique de l’évolution. La civilisation occidentale, cristallisée sur son passé qu’elle n’estime pas glorieux, se sclérose ainsi homéopathiquement mais sûrement, tandis qu’ailleurs on invente certainement le futur de l’Homme. Se repentir ne sert à rien si des leçons ne sont pas tirées des travers dans lesquels se sont fourvoyés certains. Pour que l’humanité poursuive son évolution il faut mieux regretter ce que nous ne sommes pas encore plutôt que  regretter ce que nous avons été. 


Le silence des héros

 

 23h45 déjà ; c’était un long film qui se terminait et dès le début du générique Il éteignait son poste de télévision et allait se coucher. Mais malgré l’heure, le sommeil n’était pas au rendez-vous ; des images fortes de ce qu’Il venait de voir lui revenaient en voulant l’assaillir. Non, Il ne s’endormirait pas tant que la question fondamentale n’aurait pas été abordée. Qu’aurait-Il fait, Lui ?

C’était un film sur la Résistance et des scènes de tortures atroces, insoutenables même pour le spectateur, flashaient dans sa tête.

Il s’imaginait un beau parleur avachi sur un sofa, trente ans après l’Histoire, entrain de vilipender  auprès des ses amis convaincus, ces traîtres qui avaient honteusement parlés. Que c’est facile de juger dans ces conditions ! Se prendrait-il  d’avoir l’étoffe d’un héros sans même être confrontés à aucun risque ? Cette attitude est devenue une mode, on se permet sans vergogne de juger au nom de l’absolu, mais on attend encore l’action…Les donneurs de leçons font légion surtout dans la quiétude de nos vies sans risque.

Savons-nous ce que nous avons dans le ventre ? Savons-nous quelle intensité de souffrance nous pourrions endurer sans perdre le silence ? Car, à ces degrés d’atrocités le conscient existe t’il ? Oui, répondront certains en se référant à ceux qui sont restés muets. Mais la Nature n’a pas donné, à tous,  la capacité de courir un cent mètres en moins de dix secondes, elle n’a pas mis non plus en tous la même résistance à la souffrance. Devons-nous être honteux dans certaines conditions de sollicitation de ce que la Nature a mis en nous ? D’ailleurs, sachant tout ceci, des capsules étaient distribuées afin d’être utilisées avant qu’il ne soit trop tard ! Mais là il fallait le courage de donner sur le champ, comme dans un réflexe, sa vie pour que l’idéal poursuivi se prolonge.

Des actions héroïques ont été par ailleurs réalisées par des personnes qui, quelques temps auparavant, s’en croyaient incapables. Il y a en nous des réserves insoupçonnées mais prêtes à être exploitées dès lors que certaines conditions sont réunies, mais qui resteront à jamais cachées si un certain déclic  ne se produit pas. Quel déclic lui serait-il nécessaire, à Lui ? L’envie de rester en vie, la nécessaire justice, la foi en Dieu, la foi en l’Homme, l’amour….

 

Il n’y avait naturellement donc pas de réponse à la question qu’Il se posait, mais rien n’y faisait et le poids de cette interrogation était bien trop lourd pour qu’Il puisse trouver de la sérénité, puis s’endormir. Ne pas avoir l’envergure d’un héros ne le gênait pas mais savoir qu’Il pouvait, peut-être, devenir traître le hantait pour le reste de la nuit.


 

« Il faut »

 

 Quand « il faut » se substitue insidieusement à « j’ai envie », c’est un degré de liberté qui se dissout inconsciemment dans quelques larmes sèches. Les commandements ont pris alors le dessus sur la libre conscience.

 

 Sa propre conscience n’est pas l’écart qui existe entre son comportement et une règle, telle qu’une éducation male faite a tendance à le faire croire. Sa conscience, c’est le chemin que l’on choisi délibérément. On ne peut donc se dire avoir bonne ou mauvaise conscience, ce n’est pas à nous d’en juger; l’essentiel étant que le choix soit délibéré et avec un sens.

 

« Il faut » insinue la relativité à une norme de l’acte que l’on est prêt à accomplir. Le caractère péremptoire qui y est attaché semble indiquer qu’il n’y aura pas de discussion possible, l’exécution de l’acte ne peut être qu’entaché de silence. Cela ressemble davantage à une résignation qu’à une initiative. Cette résignation est la conséquence de la soumission à un pouvoir qui éblouit et dont on espère la reconnaissance. On ne s’imagine pas un seul instant deux amants se disant : « il faut s’aimer » ! Bien que la  société impose des choix qui permettent sa propre existence, le comportement humain ne peut pas n’être soumis qu’à la dictature du falloir. L’obéissance ne peut être valeur absolue à moins d’être aveugle et de se laisser guider. Mais alors quel est donc le sens de notre existence ? Pourquoi, à contrario des autres espèces, l’humanité est en perpétuelle évolution mentale ? La brebis du troupeau à laquelle se réfèrent souvent les religions est aussi le symbole du panurgisme, il faut bien le dire !

 

Le sens de l’existence se trouve peut-être dans l’envie.

L’envie de découverte comme celle des explorateurs, de Colomb à Gagarine en passant par Amundsen, Marco Paulo ou Armstrong ; comme celle des scientifiques qui explorent la matière ou le cerveau; comme celle des conquérants Alexandre, Napoléon, Gengis Kan et César; comme celle des philosophes qui scrutent la nature humaine ; comme celle des politiques de Saint-Just à Lincoln en passant par Colbert ; comme celle qui nous pousse à tirer le rideau pour découvrir autre chose derrière celui-ci. 

L’envie d’aimer qui pousse à la découverte de ses propres capacités insoupçonnées afin de pouvoir donner de soi à l’être choisi.

L’envie simplement de vivre la formidable chance d’être là, même si l’on ne comprend pas la raison de cette existence. L’évolution, pré inscrite dans les lois du commencement de l’univers, a conduit à l’apparition d’un être conscient qui est le seul à pouvoir décider de ses choix ; elle inspire que le temps qui lui est donné doit servir à quelque chose et pas simplement à s’extasier religieusement sur la merveille du monde et de se perdre dans des remerciements d’une création. L’envie de ne plus être brebis, mais d’être berger. Ne plus suivre, mais avoir envie de participer à l’accélération de notre propre évolution.

 

Alors que « il faut » engendre le silence dans l’exécution, « j’ai envie » ouvre le dialogue, le partage, la dissertation et une joie rayonnante qui a envie de s’exprimer. « Il faut » tarit le discours et cette pierre ainsi apportée avec soupir est loin d’être un diamant qui enrichit. Tandis que parmi les envies il y en aura sûrement de sublimes qui grandiront  l’éclat de notre existence. Car l’envie n’est pas forcément celle d’un acte de moindre effort fait pour se satisfaire, au contraire ce doit être surtout  une dérivée positive de la variation des actes conscients que l’on commet. L’enfant, à qui on ne cesse de dire «  il faut » afin qu’il se forge une base, devra construire sa personnalité originale en disant « j’ai envie » sinon un individu seulement dupliqué ouvrirait sa vie; un enfant ne doit jamais être le clone de ses parents.

 

Montesquieu est d’ailleurs allé encore plus loin dans ses Lettres Persanes quand il écrit : «  Je suppose, Rhédi, qu’on ne souffrît dans un royaume que les arts absolument nécessaires à la culture des terres, qui sont pourtant en grand nombre et qu’on en bannît tous ceux qui ne servent qu’à la volupté ou à la fantaisie ; je le soutiens, cet état serait un des plus misérables qu’il y eût au monde ».

 

Il n’est nullement écrit ici qu’il faut avoir envie. Il en est certains pour qui « il faut » est un besoin, et qui ne pensent s’accomplir qu’ainsi ; l’envie n’a pour eux  alors qu’un sens pour le moins péjoratif et surtout elle n’ouvre pas à l’essentiel. Ce sont en fait des stoïciens qui recherchent l’harmonie qui coulerait logiquement du falloir. Et puis, il y a ceux, qui par leur envie, veulent initier un inconnu qu’ils veulent explorer. Que découlera t’il d’une envie d’aimer ? A priori on n’en sait rien, mais un vaste champ prometteur de fructueuses moissons  appelle à cette envie et un effort sur soi-même sera nécessaire à cette exploration. D’un coté on aura une évolution qui sera en prise avec la logique et elle se fera silencieusement à petit pas, de l’autre une évolution due à l’intuition qui pourra alors permettre le franchissement d’un vrai palier dans un bouillonnement bruyant.

 


 

Variation climatique

 

 Il n’est pas difficile de trouver quelqu’un qui peste sur « ce temps de cochon » et pourtant les ondes ne cessent de nous avertir qu’un réchauffement climatique est en cours. Paradoxe qui n’en n’est pas un puisque météorologie et climatologie ne doivent pas être confondus. Il n’empêche que la mode, intempestivement relayée par les médias, est à la culpabilisation. Tout en évitant de rentrer dans les détails dont les journalistes ont  horreur car ils pensent qu’ils contribuent à la dilution du message, le camp de la prolixité est choisi. Le choix s’impose de lui-même. D’un coté une hypothèse  de cette évolution qui rapidement conduit au silence, car les émissions solaires ne font pas recette auprès du public ! De l’autre, la mise en cause de l’activité humaine et là, la source est loin d’être tarie d’autant que l’on revêt alors les habits du chevalier superman venant délivrer le message qui va sauver le monde !

Le monde scientifique se partage sérieusement entre les hypothèses de ce réchauffement réel, mais ceux qui nous informent, en justiciers zélés, ont leur certitude. S’il en était besoin ceci montre que les médias bien qu’ils s’en défendent, ont une capacité potentielle de formatage  à une pensée unique. Le silence n’est pas par définition de leur monde, il leur faut parler, à la fois de manière ultra concentrée et répétitive. Il n’est pas rare de voir le même thème repris par l’ensemble des médias dans le quasi même instant sans qu’il y ait pourtant l’urgence de cette information. Pourquoi ? L’écume des choses doit être enivrante !...

Après un scientisme démesuré, le grand public se fait méfiant des hommes de science au profit des hommes de communication dont le discours semble plus digeste. Le doute scientifique est considéré comme archaïque dans ce monde de vitesse où la bonne trajectoire doit se définir impérativement rapidement. A la profondeur est préférée la surface bien plus commode.

Pourtant il y a une certaine raison à la culpabilisation ou plutôt à la responsabilisation des individus. La probabilité grandissante de faire n’importe quoi va  logiquement de paire avec l’accroissement de la population mondiale et à son goût consumériste. L’impunité de certaines actions dévastatrices n’est pas supportable pour l’humanité et le silence doit être rompu pour stigmatiser ces erreurs. Mais avant cela il faut s’assurer du fondement de la remontrance. Aux scientifiques de prendre leur responsabilité pour assurer ce fondement. A propos du climat, les scientifiques doivent donc démonter que le doublement des émissions entropiques de gaz à effet de serre observé aux cours de ces dernières décennies, lesquelles représentent seulement 3% du total de ces émissions, est suffisant pour dérégler le climat. Si oui, alors hurlons avec les loups ; si non, alors gare aux oies du capitole.

La surpopulation est certainement le danger le plus grave qui guète, en accroissant de fait l’impact de l’activité humaine sur le monde dans lequel  vit l’homme. Est-ce au point de faire montrer le niveau des océans ? Rien n’est moins sûr, même si on doit se révolter devant l’odieux gaspillage engendré par nos comportements irresponsables. Et ceci met en exergue ce que l’homme est devenu et la manière dont il pense voir les choses. Nos ancêtres se sont adaptés- ceux qui en étaient capables- ils ont fuit les régions devenues inhospitalières du fait de l’évolution naturel du climat, pour des régions plus harmonieuses pour leur développement. Ont-ils fait de grandes manifestations pour refuser l’inéluctable ? Ils ont placé dans les mains de leurs dieux leur destin et les plus hardis sont partis construire ailleurs. Ils ont même gagné du terrain sur la mer ! Aujourd’hui, avec l’impression que les choses sont figées à jamais et que les droits sont acquis, tandis que la mer veut reprendre son bien, l’homme moderne n’accepte pas les évolutions climatiques qui se profilent et préfère s’en rendre responsable plutôt que de tirer les conséquences de ce qu’il doit faire devant la montée des eaux. Bien sûr que ce criaillement est tout de même nécessaire car la vitesse actuelle des événements peut mettre en cause la remise à l’équilibre du système, équilibre ténu qui est responsable de l’existence de la vie sur terre. Mais, si l’égoïsme ne doit pas être le moteur de l’humanité, le principe de précaution ne doit pas venir en fin de compte scléroser l’action de l’humanité. Ce sont les mêmes qui sautent à l’élastique, randonnent hors piste ou bien roulent exagérément vite en automobile, qui réclament la sécurité absolue à la force publique, pour leur santé ! La continuation de l’humanité est dans l’évolution et pas dans le retour en arrière ou même l’immobilisme. Les réponses aux problèmes qui se posent sont dans le génie humain qu’il convient de ne pas engloutir dans la culpabilisation et dans des réglementations inhibitrices. La tendance actuelle est à la modélisation, à la normalisation, à la codification, à la rationalisation, il faut veiller à ce que tout ceci ne conduise à la paupérisation vers une pensée unique. La diversité a permis la diffusion de l’espèce humaine, la monoculture initierait son inéluctable extinction.


 

Doutes et certitudes

 

 Si le doute angoisse le quotidien, il enrichi de ses interrogations ; les certitudes, elles, rassurent mais rendent aveugle et sourd.

 Le leader cache ses doutes, s’il en a, pour ne montrer que ses certitudes qui le feront apparaître plus fort et qui lui permettront de rallier pour un moment des partisans éblouis par tant de vérités. Le chef doit entraîner dans son sillage, il le fera avec plus de succès si ce sillon est droit et bien formé. Si celui-ci est sinueux et parfois manquant ce chef sera abandonné. Le doute semble être ainsi l’apanage des faibles. Mais perclus de ses certitudes celui qui les affiche entendra t’il les voies venues de la face « doutante » qui se révèle un jour chez tous les individus ?

« Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel », cette phrase rapportée à la scène sublime du film de Chaplin : le dictateur, dans laquelle celui-ci joue avec une mappemonde, fait penser que les religions mettent en scène un dieu dictateur qui se jouerai d’une hypothétique liberté de l’homme. Si sa volonté est notre destinée, quel est donc le sens de l’existence ? La dévotion  voire la soumission ? Cela n’a aucun sens et va à l’encontre même de l’idée de Dieu ; à moins que l’on préfère la tranquille trajectoire du bon croyant bien à l’abri sous son bouclier religieux. Dans la certitude de la croyance se cache l’autruche qui faute d’être aveugle, se met confortablement la tête dans le sable chaud ; se cache aussi l’être ébloui jusqu’à l’aveuglement mais qui n’admet pas ce handicap.

Pour Elle, certaine de ses convictions et certaine que son action était épurée, Elle croyait cette action exemplaire et n’admettait pas que l’on puisse penser qu’il y manquait une dimension plus basique pour un simple humain. Ainsi, en mettant aussi son amour dans le fond de ses casseroles, Elle pensait que de ce plat ainsi confectionné, ressortirai les effluves de ses sentiments sans qu’il soit besoin de les montrer autrement. Lui, qui pensait que seules les preuves d’amour ressenties  étaient vraiment des preuves, doutait de ces sentiments  culinéarisés.

 

L’invention de la monarchie de droit divin est un habile coup politique qui permet de ranger sagement derrière soi la meute des craintifs. La certitude que le roi soit choisi par Dieu rend silencieux et docile tout ce peuple rassuré. La nomination d’un pape catholique soulève la même remarque. Dieu n’est pas l’opium, mais ce qu’en ont fait les religions, si.

 

La philosophie est le royaume du peuple des « doutants » puisqu’elle cherche des sens aux actions humaines. Comme il n’y a pas de vérité avérée pour les hypothèses avancées par elle, leur synthèse impossible rend ce monde inconfortable. Pourtant, avant que la terre  volcanique noire  soit nourricière elle a été magma sans forme, sans potentialité visible et même dévastatrice parfois. La recherche de ce que l’on est, est la construction de ce chemin de conscience qui donne une perspective à la vie. Oublié le silence docile né de la certitude, bienvenue aux débats d’idées. Tant pis pour le pragmatisme de la certitude qui n’est que du court-termisme. Tant pis aussi pour cette débauche d’énergie lors de joutes philosophiques qui apparaissent stériles au premier abord. N’attendons ni le prophète ni le messie mais cherchons les en nous. Ne suivons pas le tribun imbu de ses certitudes mais cherchons le vrai berger, celui qui refuse l’idéologie et propose à chacun de trouver son propre chemin, ce qui participera ainsi à l’affermissement d’une identité humaine dans la diversité de chacun.


Le silence des aînés

 

 L’ombre était douce sous le tilleul révolutionnaire qui poussait sur la place du village. En dessous, le banc de pierre était occupé par un vieil homme les deux mains fermement appuyées sur la crosse en corne synthétique de sa canne tenue entre les genoux. Son regard vide fixait un point au loin de ses souvenirs. Il y avait cinq minutes qu’il s’était assis là mais pour lui, qui avait perdu la mémoire instantanée, cela faisait un siècle. La petite animation qui se déroulait autour de lui ne le concernait pas, il n’en percevait vraisemblablement que quelque brouhaha qui ne perturbait pas le silence de ses réminiscences. Parfois ses lèvres vibraient et un son inaudible en sortait. Ce temps qui n’avait plus de durée était beaucoup trop long pour cet homme dont l’inactivité obligée le rendait un peu morose. Il avait été de ceux qui agissent et pas de ceux qui se répandent en paroles alors ce n’est pas maintenant qu’il quitterait son silence. De ses aïeux laboureurs il avait hérité  ce manque de propension à s’étendre en paroles. Le labeur était tel que seul l’essentiel était échangé à voix haute, il en était ainsi de génération en génération et cela avait été concentré par quelques mariages un peu consanguins. Même le soir au cours de la partie de carte à la lueur de la chandelle, l’animation des joueurs se contentait de cours commentaires sur la partie et de l’échange de pas plus de banalités sur la journée qui venait de se terminer. Dans ces conditions comment ce vieil homme aurait-il pu tenir salon maintenant ?

Dans ce monde où la vitesse est omniprésente, tout allait trop vite pour ce vieillard qui avait même du mal à suivre le journal télévisé présenté par une femme à la voix trop pointue et au débit trop rapide. Un isolement de faite s’opérait en dépit des efforts de son entourage pour l’intégrer au quotidien. Comme l’escargot trouvant le temps décidemment trop sec, il rentrait dans sa coquille et bâtissait un opercule pour se mettre à l’abri de ce monde devenu inhospitalier car bien trop déphasé. La perception de la vieillesse se fait en effet quand on s’aperçoit que l’on n’est plus en adéquation avec les pensées du moment et que l’énergie nécessaire pour rétablir l’équilibre devient au-dessus des forces de l’homme vieillissant. Alors la rupture se propage insidieusement  en le conduisant à la solitude pour laquelle le silence devient alors un allié objectif.

Aurait-il aimé qu’on lui demandât de parler des temps anciens ? Plus à son aise, un éclair venant éclairer son regard, il aurait souri parcimonieusement  et peut-être aurait-il lâcher quelques mots choisis. De ses petits enfants, aucun n’avait la curiosité de savoir ce que avant était, trop pris par leur futile quotidien ; peut-être s’en lamentait-il lors de soupirs étouffés ou de quelques bredouillements! Détaché de ce monde dont il n’avait plus la maîtrise, il se lamentait en silence d’être encore là, se sentant inutile donc de trop et implorant qu’on en finisse. Il ne pouvait pas penser que sa présence, même silencieuse, restait encore un trésor pour ceux qui l’entouraient. S’il avait été inuit, il se serait écarté du clan et dans le silence de la banquise aurait ainsi accéléré le temps qui le conduisait à sa fin. Mais a contrario, si un petit pépin de santé le touchait on sentait monter en lui un irrésistible instinct de survie, le spectre de la mort lui faisant finalement peur de pas savoir ce que deviendraient ceux qui lui sont attachés. Un dilemme cornélien qui ne se posait pas à lui puisque sa mémoire l’abandonnant, il ne savait plus ce qu’il avait dit l’instant d’avant.

Que la vieillesse peut être triste pour qui la vie était jusqu’alors faite de falloir ! Ne pouvant plus, la raison de l’existence s’enfuit et il ne reste que les ruines encore fumantes et silencieuses du souvenir.

 


La grande muette

 

Pendant des siècles privée, l’armée a été nationalisée par le Révolution. Mais sa structure pyramidale est restée : en haut les stratèges qui décident, au milieu des officiers qui transmettent l’ordre, en bas les exécutants pour lesquels certains ont parlé de chair à canon. De payés de monnaie par leur seigneur pour peut-être mourir, ces derniers défendent ensuite la patrie pour l’honneur. Sans état d’âme et sans mot dire, ils s’exécutent. Et le peuple fait, avec fatalité, beaucoup d’enfants pour lutter contre les dégâts des maladies enfantines et de la guerre.

Puis vient l’éducation, et la communication s’accélère ; mais le XXième siècle est le plus meurtrier de l’histoire des guerres. Les erreurs des haut- gradés et des politiques se savent et se commentent dorénavant. Les équilibres politico-militaires  ont conduit à un ennemi qui n’est plus massif  et bien identifié mais diffus et insidieux. Le comment et le pourquoi d’une guerre  était l’apanage d’un petit nombre, même si tout le peuple en payait le tribu anonymement et sans demander de comptes. Le secret n’était pas une stratégie mais un mépris envers ceux que l’on envoyait combattre. Aujourd’hui, beaucoup moins sûr de leur identité, le biffin et sa famille réclament la transparence et en premier lieu pose la question du pourquoi. Est-ce légitime ?

Tout dépend de ce qu’on appelle démocratie. S’il s’agit d’une démocratie participative l’avis de l’intéressé doit être pris en compte ou tout au moins recensé ; reste à savoir comment la décision sera prise ! S’il s’agit d’une démocratie élective, un mandat de représentation est donné pour un certain temps et théoriquement sur un programme. Mais on sait que ce programme présenté dans des conditions données peut être troublé par une évolution imprévisible de ces conditions. Cela veut dire que l’on donne un blanc sein et qu’on se réserve le droit de changer son vote à la prochaine élection au cas où les actes des dirigeants ne seraient pas conformes à ses convictions. Par ailleurs la diplomatie ne se fait jamais à cœur ouvert dans le monde réel. Quelles informations peut-on donner en pâture à son peuple sans risquer de compromettre la vie de ce peuple au cas où les choses tourneraient mal. Dans le monde des anges tout est envisageable, dans le monde réel il faut parfois oublié d’être naïf.

Le secret du pourquoi n’est donc pas une tare s’il n’est pas utilisé par mépris de ceux que l’on met à l’écart de la confidence ; il sera une arme si l’objectif est de protéger ceux-ci.

Le comment pose beaucoup moins de questions. Image-t’on un seul instant que l’opération « Overlord » eût pu être réalisée avec une information de chacun des participants ?

Le silence peut effectivement être d’or parfois, si son usage en est humaniste.

 


Le silence de Dieu

 

 Le hasard pour les uns, Dieu pour les autres et malgré cela rien de plus pour appréhender le sens de l’existence.

 

 Le postulat du hasard implique que la question sur le sens de l’existence ne se pose pas. La vie sur terre ne serait pas vraiment le fruit du hasard mais plutôt d’heureux concours de circonstances qui, répondant certainement à une loi physique que l’on ne soupçonne même pas, aurait conduit à des combinaisons particulières dont la probabilité de survie était importante en entraînant d’autres combinaisons possibles qui complexifieraient ainsi le système, lequel s’auto élabore et se raffine. Tout cela pour arriver à l’Homme et à sa capacité de penser, de choisir. Mais pourquoi s’arrêter là, même si une évolution lui est encore attachée ? Pourquoi est-il de bon ton que les hommes se respectent et respectent leur milieu ? Pourquoi vouloir laisser une empreinte qui se manifestera sous la forme d’une descendance ou d’actes vénérables ? Pourquoi ne pas seulement jouir de cette chance de vivre? Le dit hasard doit perpétuer son œuvre et alors l’homme n’est guère plus qu’un pion malgré ses capacités insoupçonnées. « Je passais là par hasard.. » dit la chanson et il n’y a pas plus de cas à donner à cela à l’existence humaine. Les tenants de cette philosophie, quand ils sont seuls avec leur for intérieur, n’ont-ils pas la curiosité de se demander à quoi sert tout cela , si tout cela n’a pas tout de même un sens même s’il n’est pas nécessaire d’inventer Dieu pour essayer de trouver un sens à l’existence ?

Après les dieux, l’homme et son esprit modélisateur et dans sa volonté d’avoir une idée simplificatrice a eu besoin d’un Dieu. Devant tant de mystères il fallait un postulat qui les rassemblerait pour mieux les éluder. Que Dieu soit crainte ou qu’il soit amour ne nous renseignent pas sur le sens de notre existence. L’existence du croyant prend peut-être une direction mais elle manque de sens. La toute puissance prêtée à Dieu permet de croire que l’on comprend sans avoir rien résolu. Dieu est-il acteur ou spectateur, ou bien est-il cet arc-en ciel dont on ne peut jamais atteindre le pied ? Le Dieu architecte est le plus facile à imager, c’est celui qui le jour du bing bang appuie sur le bouton qu’il est lui-même, en ayant mis préalablement l’essentiel dans le vide initial pour qu’un jour dans un coin de l’univers puisse apparaître l’Homme, mais le sens de cet acte n’est pas défini. Pourquoi cette  création préinscrite dans les lois initiales ? Le système, à un moment de son évolution logique, a donc fait naître cet être qui, de plus, a la possibilité d’inter-réagir avec le système lui-même au point de pouvoir le modifier. Ces modifications possibles sont-elles les illusions de la liberté ? Quelque soit ce que l’on prête à Dieu comme pouvoir : création, lecture dans l’avenir, protection du bien, cela ne nous dit rien du pourquoi de l’existence humaine. Un dieu peut-il avoir un but et un dessein pour l’Homme sans que celui-ci ne soit son jouet? Si Dieu sait déjà ce que l’homme va faire de son univers, pourquoi avoir tenté cette expérience de l’existence dont il savait le résultat?

Mais Dieu ne serait pas seulement architecte, il serait aussi amour selon les religions. Dieu ne serait pas seulement la Nature, il serait aussi le sel des relations humaines. Si ceci peut enrichir le comment de la vie, cela ne crée pas un sens à la vie. Si ceci peut aider dans le comportement humain, celui-ci n’est-il alors qu’une fin en soi ? Et Dieu n’a t’il pas été pris de colère quand il aurait initié le Déluge ? Sa création se dérobait à lui en faveur du Malin, il fallait redistribuer les cartes ; la Bible fait encore une fois apparaître ici l’homme sans véritable liberté. Dieu a même été obligé de lui envoyer son fils pour lui apprendre la rédemption. De son mystérieux silence il nous envoie des prophètes pour nous transmettre sa parole. Mais cette parole est prisonnière du langage et des limites de traduction des hommes, fussent-ils prophètes. Que cela soit des paraboles ou bien des commandements,  ils s’adressent aux capacités humaines qui les interprètent ou bien les appliquent avec foi c'est-à-dire a priori mais sans aucun sens pour la compréhension de ce que nous sommes vraiment.

 A moins que Dieu n’ait pas voulu exercer  la toute puissance que les religions lui donnent  et que l’homme qu’il a inscrit dans les lois du Bing Bang doive l’aider dans le devenir de l’univers. Il nous aurait alors offert un espace avec la liberté de créer à notre tour. Chaque jour l’action humaine dans toutes ses dimensions, modèlerait le monde à sa façon, le polissant et le repolissant pour qu’il tende asymptotiquement vers une perfection qui serait son paradis. La bible propose le jardin d’Eden comme un point soi-disant initial et que l’homme aurait quitté par faute, mais on devrait plutôt le voir comme ce vers quoi nos actions nous emmènent de manière chaotique. L’homme est donc créateur et rien ne doit freiner ce besoin de création dès lors qu’il ne s’oppose pas à l’homme lui-même. Le sens de son existence est de compléter l’univers dans lequel il se développe. Bien peu de monde a cette conscience car trop pris par sa simple survie ou bien bercé par un désir de jouissance. Et puis parmi ceux qui ont cette conscience de l’existence il y en a qui vont profiter de leur découverte pour aliéner des suiveurs. Heureusement dans le vaste brassage d’ADN, un petit nombre d’individus naissent avec la capacité d’entreprendre des constructions diverses qui façonnent ce que l’Histoire laisse aux générations futures. Certains, baptisés prophètes,  montreront des directions à suivre en schématisant par une religion une signification de l’existence.

« Quoi que tu imagines, Dieu est différent de cela » dit un saint musulman; parce que Dieu est dispersé dans l’univers sous les formes les plus diverses que l’homme voudra bien lui donner. Il restera silence car il

n’est qu’une voix muette qui parle secrètement à notre être, même si d’aucuns affirment l’avoir audiblement entendue comme le met en scène quelques religions. Dieu est dans le silence des cathédrales aussi bien que dans le souffle des grandes orgues dont les notes sauront peut-être nous toucher. Dieu n’a pas de langage humain mais il est immanent dans les mots que l’homme ose prononcer. Dieu n’est pas une invention commode, il existe au travers de toutes les inventions humaines qui font avancer le monde. Dieu n’impose rien, il propose aux hommes de l’aider à poursuivre la création dont l’infinité de l’étendue tour à tour les troublera et les comblera. Dieu fait de l’homme un artisan de sa création mais l’individu n’a de sens que s’il est un maillon d’un ensemble qu’il est difficile parfois de s’imager. Terrestrement mortel, l’homme mort accompagne l’humanité sur ce chemin infini qui le conduit vers cette perfection qui semble lui échapper comme s’échappe l’horizon que l’on croyait pouvoir atteindre. Et si Dieu s’était trompé et que l’homme ne devienne finalement qu’un apprenti sorcier, il n’enverrai pas de rédempteur pour racheter les hommes mais encore une fois le hasard des assemblements génomiques produirait des êtres dont l’aura serait capable de montrer à nouveau le vrai chemin aux pervertis, à moins qu’une sélection naturelle ne vienne rudement secouer l’humanité pour permettre un nouveau départ.

 

 Dieu se trouve donc dans le silence d’une introspection, discret au point que certains n’en verront pas son utilité, alors que cette discrétion est l’essence même de Dieu qu’il ne faut pas imaginer mais vivre ni par dévotion ni par soumission car là n’est pas l’objet du sens de notre existence.

Si Dieu est l’alpha, l’homme l’aide à l’établissement de la trajectoire vers l’oméga.


Le rêve anti-écologique

 

 L’observation du monde incite à penser à l’instar de Romain Gary que l’humanité est en mode pause dans son évolution. Faudrait-il attendre une éternité de quelques milliers d’années pour qu’elle reparte d’un élan nouveau ? Devons-nous attendre  un bon génie qui relance le processus avant qu’il ne devienne un de ces dictateurs qui enivré de pouvoir en oublie les prémices qui l’avait conduit à guider son peuple. Doit-on attendre que la révolution internationale  rassemble une majorité d’humains dans une même revendication ? Devons-nous espérer un nouveau prophète alors que les Ecritures nous disent que le dernier du nom de Mahomet a déjà été envoyé, les musulmans pensant que l’islam est l’ultime religion !

Le monde est entré dans une logique qui assure cette stagnation et rien ne semble devoir en changer le cours. En chevaliers blancs les écologistes, et certains ralliés à cette cause du fond de leur salon qu’ils n’ont jamais quitté,  prônent la durabilité et la biodiversité. Pour eux le sort de l’humanité est caché derrière ces deux mots et la logique du moment semble ne pas en faire deux maux.

 

Dans ce monde, les plus entreprenants ont construit insensiblement un système sur les bases les plus inébranlables de l’homme, son égoïsme. Les autres, des inexorables suiveurs, n’avaient d’autre choix que de supporter ce système d’autant que par leur propre égoïsme ils y trouvent, quoiqu’en disent certains, matière à ressentir une certaine idée du bonheur. Les derniers enfin, les plus nombreux, accaparés par leur survie ont courbé l’échine sans se plaindre. Bien que des penseurs aient stigmatisé ce système, leurs interprètes se sont pris les pieds dans le tapis du pouvoir et ont ruiné tout espoir de changement d’autant que la force des entreprenants semble inéluctable.

Dans ces conditions de stabilité, donc de stagnation, et que la durabilité et la biodiversité finiront par structurer, comment espérer une reprise de l’évolution humaine ? Ce n’est pas en changeant quelques mauvaises habitudes comportementales, ni pires en voulant un retour en arrière en réinventant par exemple le moulin à vent, pas plus qu’en croyant au principe de précaution, que la rupture pourra se faire. L’emprise de la structure du monde bouche tout nouvel horizon, même le génie humain ne semble pas capable d’affronter ce monstre et il ne soigne que quelques égratignures.

 

 Il faudrait donc un choc, un de ces chocs qui met KO; tandis que le réveil serait une nouvelle naissance !

 

Non, il ne s’agit plus d’espérer une guerre salvatrice comme le pensaient facilement nos aïeux. Après une guerre il y a les soi-disant vainqueurs qui ne sont vainqueurs que de plus de pouvoir sur ceux qu’ils ont vaincus. Tandis que ceux-ci humiliés par leur défaite, ne penseront qu’à leur vengeance. Et l’humanité, outre avoir perdu des membres, n’aurait pas avancé d’un pouce.

 

Et si la Bible était prémonitoire à défaut d’être peut-être historique ! Et si l’humanité était en train de s’auto-administrer  les conditions du déclenchement d’un Déluge ! Non pas une montée des eaux due au dérèglement climatique ou au Divin. Mais un de ces virus qui enfoui dans les entrailles de notre consommation, les déchetteries par exemple, se modifierait petit à petit et se raffinerait pour finalement  contaminer le malheureux inspecteur du site et se répandrait sans aucune chance d’être contrôlée par l’OMS. La virulence adjointe à la mobilité géographique des hommes et à une certaine faiblesse physique héritée de leur mode de vie, serait foudroyante pour 90% de la population des continents économiquement avancés, ne laissant que quelques Lucie modernes vivantes, témoins du passé et dépositaires de l’avenir de la future humanité. Dans un silence de fin de cataclysme les miraculés, sonnés par ce coup quasi fatal mais conscients des raisons de ce qui vient de leur arriver, échafauderaient certainement dans leur esprit le contour d’un nouveau système !

Ne faudrait-il pas ce choc ? L’humanité ne doit-elle pas espérer ce choc ? A quoi bon les bonnes intentions écologiques de l’instant qui ne changeront en rien certaines mentalités bien trop ancrées. Certes une pseudo bonne conscience envahirait alors nos cerveaux mais l’essentiel c'est-à-dire l’organisation du monde ne serait pas atteint, bien au contraire.

 

Ces propos peuvent être qualifiés de terroristes par les biens pensants et pourtant ils décrivent une éventualité qui n’est pas impossible et qui correspondrait à une renaissance de l’humanité traumatisée et enrichie des enseignements passés. Les crises sont souvent le seul moyen de s’extraire d’une situation figée. Garder le silence ne servirait à rien car les conditions de déclenchement de cette résurrection ne sont, de toutes façons, pas du ressort de la volonté humaine même si l’homme en serait l’artisan inconscient.


Paroles

 

 Donner sa parole ou au contraire penser que les écrits restent tandis que les paroles s’envolent, montrent les fluctuations possibles de la conscience humaine. Confiance ou méfiance sont les choix  qui détermineront un certain style du vivre ensemble. Mais dans notre ère du numérique la parole enregistrée peut-être convertie facilement en écrit et la force initiale de la seconde proposition s’en trouve profondément modifiée. Dans un monde étroit, se taper la main suffisait pour conclure la vente de bestiaux ; dans notre monde ouvert les juristes décortiquent les termes du contrat avant d’engager les deux parties, seule la naïveté ferait faire autrement. La mondialisation dans sa phase initiale change les relations humaines plutôt en les tendant. La non connaissance de l’autre engendre la défiance qu’exploitent habilement certaines idées politiques en cristallisant sur le moi plutôt que sur le nous. L’ouverture sur le monde c’est d’abord l’ouverture de son propre esprit. La culture, à laquelle on se réfère souvent légitimement ou bien à l’ombre de laquelle on se protège, c’est en fait le résultat de l’intégration progressive de différences potentiellement assimilables sans toutefois que l’on désire l’alignement sur une pensée unique. L’histoire de ces sédimentations n’est pas terminée, heureusement ! Il existera tout de même une éternelle méfiance issue de la capacité de nuire pour qui le veut, conformément à la liberté reçue. L’islam simplifie le problème en pensant que seul le Bien est en chaque musulman tandis que le Mal ne serait qu’une sorte d’ectoplasme extérieur qui, avec ses tentacules, tenterait d’engloutir l’individu. Dans ces conditions et si tout le monde est bien aligné dans la soumission, il n’existe corrélativement plus de tension  entre les humains qui n’ont plus de raison de se méfier les uns des autres et Candide aurait alors raison….

L’écrivain souhaite que ses idées soient partagées et il lui semble que l’écrit fixera mieux sa pensée en dépit de l’interprétation qui pourra en être faite, la fréquence des récepteurs n’étant pas toujours exactement en phase avec celle de l’émetteur. Aider par le silence de la lecture le récepteur tentera d’harmoniser ces fréquences en toute sincérité.

La parole par définition ne bénéficie pas de cet environnement silencieux et elle ne touchera que l’affecte. Celle du politicien est faite pour flatter ses partisans qui sont tout près à l’encenser tandis que ses détracteurs exposeront a priori leur défiance aux mots prononcés pour mieux ne pas en être affecté. Ces paroles ne sont pas faites pour construire mais elles sont prononcées pour rassurer certains, élection oblige ! Un politicien émet une parole, il ne la donne pas. Dans ces conditions les trop rationnels diront qu’il faudrait mieux se taire puisque ces mots ne servent à rien, d’autres penseront que c’est le transfert qui est intéressant et productif de liens.

Il est certain que, dans ce monde où les individualités l’emportent sur l’esprit d’intérêt général, la parole n’a  jamais   été aussi sollicitée. Des flots et des flots de mots s’écoulent du haut parleur du poste de radio. Banalités, futilités, hypocrisie, inconsistance remplissent de nombreuses émissions qui sont pourtant de plus en plus écoutées. Bien particulière certes, mais reflétant bien se ventre mou de la communication, l’interview d’un entraîneur sportif, tant attendue et pourtant sans surprise, faite de formules vides et toutes faites. Mais qu’en attendait-on ? Une révélation sur sa stratégie, la divulgation des secrets de vestiaires ? Utopie bien sûr, et pourtant l’auditeur s’en contente et en redemande, l’audimat le montre. Oubliant que l’homme devrait être avant tout bâtisseur, il n’est pour l’heure que jouisseur et il ne veut pas de discours structurant, il n’a d’intérêt que dans de que l’on appelle aujourd’hui le buzz. Donc inutiles paroles, encore une fois ? Non, celles-ci en dépit de leur pauvreté ont un rôle inconscient de contrepoids à l’isolement égoïste de l’individu et préserve ainsi un lien social ténu. Plus l’individu consacrera d’attention sur lui, plus il aura besoin de son téléphone portable, car celui-ci devient un exutoire de la solitude de son attitude. Des philosophies ont voulu broyer l’individu, d’autres l’exacerbent, le pendule est aujourd’hui de ce dernier côté et il en découle un certain état de l’humanité qui est exploité commercialement par les plus lucides pour imposer des modes bien en phase avec ces besoins inconscients.

Pourtant, si Martin Luther King avait écrit : « I’ve a dream » au lieu de  prononcer ces mots, l’impact eût été assurément moindre. Il est des paroles qui touchent l’affecte et dont le timbre fait mouche pour amener à la saine réflexion. Noyées dans cet océan d’insignifiance verbale, seule leur force évite qu’elles ne se perdent avant d’être gravées éternellement sur le disque dur de la mémoire de l’humanité.

 


 

Le silence de l’interdit

 

 Cela faisait maintenant trois longues années qu’elle était partie en pleurant et qu’elle n’avait plus donné signe de vie. L’origine de ces pleurs resterait un mystère pour Lui et le silence qui suivit restera cicatrice dans son âme.

Durant des mois ils avaient fusionné leurs cœurs sans que leurs corps ne le fissent. Jamais elle n’avait pu franchir clairement les interdits de sa religion alors que son cœur battait aussi pour Lui. Tandis que Lui avait réussi, à force de réflexion, à combattre l’impossible ; mais la dualité d’amours à laquelle il était arrivé restait cachée et silencieusement secrète. Il avait consciemment choisi ce chemin difficile car persuadé qu’Il pouvait donner de Lui à ses deux amours et que donner ne pouvait être interdit. Il savait le poids des cultures et savait donc que son attitude ne pouvant être comprise, enclencherait sûrement des cataclysmes familiaux qu’Il ne souhaitait pas évidemment. Ce n’était donc pas de la discrétion dont ils usaient mais du silence qui les mettait à l’abri du qu’en dira t’on et des catastrophes. Ces échanges s’étaient inscrits indélébilement dans sa mémoire car Il avait dû batailler ferme pour la convaincre d’avouer leur amour et cette force qu’il avait trouvée alors, servait aussi à cet enracinement des faits. La mémoire est parfois volage et l’oubli qui lui est associé trouve souvent naissance dans la superficialité des actes. Pourtant il est des faits futiles qui restent en nous sans même qu’on le veuille et d’autres plus importants qui n’arrivent pas à s’imprimer. Comme une cicatrice encore suintante, ce qui s’était passé entre eux était gravé en Lui et des souvenirs perlaient délicatement. Il était heureux d’avoir la chance de vivre ces moments de réminiscence et Il assumait sans jamais rougir de ses choix. Pour elle, repartie entre Atlas et mer, qu’en était-il ? La force de sa religion et sa culture avait-elle réussi à gommer les imperfections auxquelles elle s’était adonnée. En islam le repentir sincère permet l’effacement du pécher, mais l’islam a-t-il le pouvoir d’agir sur la mémoire, peut-il vraiment effacer des faits sciemment vécus par le croyant. L’individu peut-il être reformaté pour que le souvenir ne vienne plus jamais polluer sa vie future? Un jour, un soir ou une nuit se retrouvant seule, son esprit pouvait-il lui rappeler quelques doux moments de son existence passée? Ou bien la peur suffisait-elle pour ensevelir sous une chape de béton des souvenirs bien trop embarrassants?

 La mémoire humaine n’a rien à voir avec un disque dur sur lequel on grave volontairement les épisodes que l’on désire protéger. La mémoire est un élément de nous même, elle est dépendante en grande partie de votre volonté et il est vraisemblable que malgré tout ce qu’Il lui avait donné, qu’il n’en reste rien….

Ce n’était pas le silence de l’interdit, mais l’inexorable force de la religion  avait éteint le feu et tué irrémédiablement le phénix. La brebis égarée avait rejoint le troupeau!


Le silence de la mort

 

 Comme la lumière de l’aube appelle les ténèbres du soir, comme la feuille chiffonnée du printemps attend sa couleur d’automne, comme la pleine lune va devenir obscure, le cycle de la vie  déroule sa circonférence dans un univers dont la trajectoire temporelle semble, elle, infiniment linéaire. Petits ou grands, riches et pauvres, puissants ou manants, beaux et laids, elle nous attend irrémédiablement. Le premier cri du nouveau-né est pour cette épouvantable fin  qui l’attend; puis oubliant tout, il vit avec l’illusion de l’éternité et devient un homme prêt à sauver son prochain ou bien à l’ensevelir de tracas pour que sa vie à lui soit égoïstement meilleure. Il accumulera des richesses à ne plus savoir qu’en faire, il désirera des pouvoirs pour avoir l’air d’exister. Il fera la guerre au nom de Dieu. Mais aussi il construira des cathédrales, des châteaux, des barrages et des fusées. Il peindra la Joconde ou sculptera la Piéta. Il voudra comprendre l’âme et l’esprit. Mais jamais il ne prendra conscience de l’élément fini qu’il est dans un monde infini pour en tirer une leçon d’humilité. Pourtant il aura peur de la mort et inventera des religions pour se rassurer sur ce qui suit car il a l’obsession de l’éternité. En lui offrant cette éternité les religions participent au sentiment d’intouchabilité qui conduit les hommes à l’égoïsme, contrairement à ce qu’elles souhaitent.

Qu’en serait-il s’il prenait conscience que dans le silence de la mort s’effectue la fertilisation des esprits des vivants comme la feuille lamentablement tombée se transforme en humus. Il  prendrait peut-être toute sa part d’actions pour en faire une vie enrichie sans le but d’un paradis ou d’une satisfaction personnelle à arborer aux autres. Le caractère transitoire de l’existence de la vie est fondamentalement résolu dans la nature qui s’enrichi par la mort, tandis que le seul élément -l’homme - qui ait  la conscience de ses actes ne l’assimile pas, lui. Se sentir mortel donc éphémère tendrait à ne pas vouloir posséder davantage et recentrerait les actions humaines sur l’essentiel. Les êtres vivants de la nature, privés de leur propre conscience, ne gambergent pas, ils ne  consacrent leur énergie qu’à la survie de leur espèce qui nécessite que les plus résistants d’entre eux se reproduisent. Issu du règne animal, l’homme a hérité de ce nécessaire instinct de domination en oubliant que son intelligence lui permettrait pourtant un autre comportement. Dans la nature, la femelle est toujours banale dans sa beauté pour échapper aux prédateurs lors des mises bas et des couvaisons,  tandis que les mâles sont toujours plus luxuriants pour conquérir ces femelles. Nous, nous n’en sommes encore qu’à analyser la perversion du sexisme après quelques millions d’années d’évolution… et toujours prêt quand même à faire le coq pour conquérir quelques poules faciles. N’y a-t-il pas d’autres attributs plus humains à faire valoir ? Mais dominer est bien trop excitant pour s’accomplir et fait appel à cette ancestrale loi de la jungle qui ressurgit comme une tare qu’on croyait avoir terrassée.

Cette conscience de l’éphémère engendrerait-elle de l’ennui et que voudrait dire alors le mot ambition ? Alors que certains voudraient en faire un thermomètre pour mesurer notre richesse, ne conviendrait-il pas d’effacer du dictionnaire le mot bonheur sur lequel personne ne s’entend pour lui donner un sens absolu ? Si l’ambition de la domination est remplacée par celle d’organiser, si l’ambition de la richesse devient celle du seul bien-être, si l’ambition d’être mis en avant s’évanouit devant celle non pas du devoir accompli mais de l’action libre et désintéressée, si l’ambition est celle de vivre vraiment sans artifices mais avec la joie de participer, d’agir, alors le temps de vie que l’on a à sa disposition sera riche pour soi-même et pour l’humanité. Quoi d’ennuyeux à cela ? La joie n’est pas interdite, ni la jouissance. Mais la vie, ce ne sont pas que des choses agréables et douces, ce sont aussi des épreuves qui ne sont là que pour nous faire grandir et non pas nous éprouver comme les religions nous l’enseignent. Bâtir dans l’inconnu est une aventure avec son lot de difficultés et de joies qui ne sont que les deux faces d’une même médaille : la vie. Mais l’édifice est colossal, et épuisé dans sa force ou sa créativité, le mourant doit espérer que d’autres vies poursuivent l’œuvre. Dans le silence du recueillement se fera le passage de témoin essence même de l’éternité.


Le silence du miroir

 

 Mis à part les narcissiques, l’image renvoyée par le miroir est souvent refusée. On ne veut souvent pas croire à l’authenticité du reflet. Ne s’imangine-t’on pas plus maigre, moins grisonnant et moins ridé ? Mais aussi on ne s’imagine pas si médiocre ! Notre réalité est souvent dure à reconnaître. Dans l’intimité du silence du miroir on ne pense alors qu’à se refaire un lifting intérieur, on reconnaît tacitement les dégâts et l’on œuvre à enterrer nos limites, à masquer les défauts, à maquiller les déficiences, à travestir nos penchants. Et il faut bien le reconnaître dans ce monde de surface cela suffit souvent pour faire illusion. On arrive ainsi à naviguer, à donner le change et faire paraître une image acceptée par les autres. Il existe beaucoup plus d’illusionnistes que de personnes authentiques. Et si cette illusion était une chirurgie esthétique provisoire pour se réformer vraiment il n’y aurait rien à y redire bien au contraire, mais c’est en fait une tromperie organisée. Le monde fonctionne sur ces faux-semblants et l’on s’étonne ingénument qu’il soit si laid !

Pureté et sensibilité ne sont que puérilités qui ne peuvent donner accès à la reconnaissance. Sincérité ne rime pas avec efficacité. Même ce que l’on pourrait considérer comme qualité est préférablement caché pour donner un visage plus sérieux. N’en déplaise à certains, tous nous pratiquons cette parodie du paraître pour être plus à l’aise dans ce monde stéréotypé.

 

Fini de jouer, si chacun décidait d’être soi en s’acceptant simplement et sans peur de l’effet  produit sur l’autre ! Si l’on acceptait les qualités et les défauts des autres au titre que nous avons les nôtres et que leurs complémentarités sont peut-être sources de richesse. On entend déjà les irréductibles crier naïveté et se moquer. Mais un jour il faudra bien que les choses changent si on espère voir changer le monde.

Dans ce face à face les yeux dans les yeux, il ne faut surtout pas regarder le miroir en lui demandant si on est le plus beau mais en lui demandant ce qu’il faut faire pour  être plus regardable. Mais un miroir n’a pas de haut-parleur, il ne fait que renvoyer un reflet et nous mettre devant nos responsabilités, sa réponse est en fait celle que l’on voudra bien se faire à soi-même en toute conscience. Il n’est qu’un instrument d’introspection de notre moi profond et  nous envoie un signe dont on a la liberté d’interprétation et de correction. Le silence du miroir permet de croire que l’on a rien entendu ou bien que le regard sur nous même ouvre la voie à l’humilité.

 


Dans le silence du for intérieur

 

 Le contemplateur vient de recevoir l’improbable autorisation de toucher l’œuvre. En silence, ses doigts d’abord hésitants puis de plus en plus résolus parcourent la sculpture tandis que les yeux fermés il apprécie les courbures parfaites de cette femme nue statufiée dans sa beauté. La douceur du toucher s’ajoute à la justesse des formes pour le conduire à une satisfaction absolue qui traduit la relation univoque qu’il a avec l’œuvre muette.

Le soir venu retrouvant sa femme, il lui prendra l’envie de caresser son corps dans une volupté qui n’a rien à voir avec son expérience précédente. Il ne le fera plus seulement pour accéder à une sensation personnelle mais il aura l’espoir que la délicatesse de ses caresses permette l’exaltation du bien-être de son épouse. Il sera plus important pour lui de sentir la satisfaction de l’autre plutôt que la sienne. Une relation bijective sera alors établie. Mais si par hasard ces vraies caresses données ne deviennent que chatouilles reçues, ce serait un camouflet pour le solliciteur.

Le cerveau, usine chimique aux processus complexes, produit dans le silence de son for intérieur des molécules qui seront finalement notre pensée ou notre ressenti. Mais l’on sait qu’un dérèglement de cette production fragile peut avoir lieu, par une tumeur par exemple, en faisant que la même personne maintenant malade pourra avoir une toute autre personnalité que celle de son état initial. La caresse, appréciée autrefois, ressentie chatouille désormais n’est-elle pas le révélateur d’une mutation chimique, due peut-être à des facteurs non identifiés et qui fait apparaître un individu nouveau. Une évolution hormonale peut transformer une femme réceptrice en une femme neutre affranchie de ses sens. Comme l’œuf et la poule, la volonté humaine est-elle une conséquence ou une cause de cette production hormonale, ou bien est-ce le conflit de la chimie qui au bilan donne une certaine volonté à l’humain?

Déçu, le solliciteur malheureux ne verra que son impuissance à stigmatiser le désir de sa partenaire de se sentir bien. Différents scénarii peuvent alors découler de cet épisode, ce qui engendre la complexité et la richesse des rapports humains qu’explorent  romanciers et  cinéastes.

 

 

Le silence du cloître

 

  Que cela soit dans le silence du cloître ou dans la force du chant faisant vibrer la voûte gothique, un acte d’amour serait commis. Et, en vertu d’une unicité impérative, ces femmes ou ces hommes tour à tour silencieux et bruyants ne peuvent être amoureux que de Dieu.

La quiétude du vrai silence est certainement prometteuse de réflexions vraies qui se voient glorifiées par le chant dans l’instant suivant. Nul ne peut contredire les actions spirituelles issues de cette réclusion pour l’enrichissement de notre propre esprit. Nul ne peut en nier la participation à l’élaboration de notre culture, les écritures enluminées par des moines érudits ne sont  qu’un exemple.

Mais, la Vérité ne peut-elle naître que dans le vrai silence comme le monde est né du Rien de l’instant initial. Faudrait-il que certains se mettent en congés du monde pour nous apporter la Parole ? Il y aurait-il le monde de la  matière et l’énergie  d’un côté et le monde de l’esprit de l’autre, préfigurant le Grand Passage promis du mortel à l’immortel ? La réclusion des moines ne symbolise t’elle pas l’impossible co-habitation de l’esprit et de la matière ? En refusant le monde et ses multiples carrefours à savoir prendre, en ne pouvant qu’aimer Dieu et se refusant l’amour humain, ces religieux ne participent-ils pas à cette démixtion esprit-matière que le reste de l’humanité essaye  difficilement de vaincre ?

Dans un monde qui se complexifie, le spirituel qui émanait d’un besoin d’assurance, globalement s’évanouit dans le matériel qui devient le nécessaire indispensable de la pyramide des besoins de Maslow, et la chose religieuse semble ainsi déphasée, sauf en particulier pour les religions pour lesquelles la soumission est à la base du comportement.

Mais inexorablement le balancier oscille et déjà certains retrouvent le besoin de spiritualité tout en n’acceptant plus d’être brebis et sont à nouveau en quête de sens. Les religions, engluées dans leur dogme, enfermées dans la solitude de leur contemplation, se rapprocheront-elles de leur base humaine en leur offrant autre chose que de la symbolique ? Que Dieu soit absolu on peut le concevoir, mais les religions ne devraient être, elles, qu’un moyen sur la route de l’oméga que se donnent les hommes pour aider leurs imperfections à se corriger.


 

Le silence de la fin

 

 Le silence n’a d’intérêt que pour mettre fin au bourdonnement futile de bon nombre de nos dires, ou bien pour mettre en exergue l’œuvre musicale ou la parole tant attendue. Il peut être source de profondeur autant que d’hypocrisie. Il est le paradis du penseur et l’enfer de l’exalté. A mesure que le monde s’interconnecte, le silence le fuit en entraînant un déficit de l’esprit. Le silence n’est pas un refuge, cela serait trop triste, mais il peut être un exutoire à la solitude dans laquelle l’a mise l’égoïsme humain.

 Il ne faut pas demander le silence, il faut en avoir envie. Triste quand il sépare, il peut-être communion. Le silence n’existe que par le bruit, synonyme de vie. Il n’est ennuyeux que pour ceux qui n’ont rien à dire.

Le silence est un espace « utile » pour  qui veut feindre ou bien oublier. Il est une prison pour qui veut écarter. Le silence est le crime des témoins peureux et la gloire des héros muets. Il est le respect que l’on doit aux disparus.

Le silence c’est le Rien du Tout d’avant le bing bang. Le vide interplanétaire bannit le son, le silence est l’état vibratoire sonore absolu de l’univers. Ayant besoin d’un support pour se propager, le son n’existe que corrélativement aux conditions élémentaires nécessaires à la vie. Le silence est alors l’éther qui sustente la pensée. C’est l’humus d’où la graine va germer, c’est le puits d’où l’eau sera tirée.

 

Mots silencieux, qu’ils dérivent modestement vers des neurones avides et activent le prodigieux pouvoir d’explosion de réactions nourricier de notre évolution mentale, dans l’espoir de l’écoute d’une symphonie d’un nouveau monde!


 

Pat TIOCŒUR               

Ancien chercheur sur la matière inerte, Pat TIOCŒUR  explore maintenant l’âme humaine et cherche un sens à la vie. Outre de finaliser sa propre réflexion, l’écriture lui offre la possibilité non pas de donner des leçons mais de solliciter le questionnement de ses lecteurs. Après « La femme voi(io)lée » où était abordé les interdits et la recherche d’un chemin de conscience, l’essai sur  « Le silence » lui donne l’occasion d’une interrogation, à voie haute, sur ce qu’est la vie.

                

 

 

 

 

 

 

 

 

Au travers de divers épisodes silencieux choisis : du silence d’un couple au silence de la mort en passant par le silence des électrons, ce moment si spécial est souligné pour en percevoir ses causes et ses conséquences. Le silence est-il le seul état qui permette d’aller au fond des choses ? Le silence est-il la réponse au brouhaha ambiant dont aucun sens n’est audible ? Le silence est-il la marque de la faiblesse ? Le silence est-il le terreau de l’esprit ?

Cet essai est plutôt un questionnement que des réponses sur le sens de notre existence, et le silence est le mobile de ces intergations. 



[*] surface

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